Quelle influence la maternité a-t-elle sur l'incroyable retour de Kim Clijsters?

Demi-finaliste des Internationaux des États-Unis à son troisième tournoi seulement après une retraite de plus de deux ans au cours de laquelle elle a donné naissance à une fille, Jada, Clijsters paraît plus forte qu'elle ne l'a jamais été.

«Je suis surtout plus forte dans la tête, raconte la Belge de 26 ans, sur son blogue vidéo. La présence de Jada me permet d'oublier le tennis entre les matchs et les entraînements. Cette semaine, nous sommes allés à Central Park, au zoo... Et les sorties dans les restaurants sont toujours amusantes.» 

Ces propos rejoignent ceux de plusieurs championnes qui ont réussi, avant Clijsters, le mariage famille-sport. Il y a deux ans, Lindsay Davenport a remporté un tournoi trois mois seulement après avoir donné naissance à son fils Jagger.

Quelques semaines plus tôt, huit mois après la naissance de son fils Cornelis, l'Australienne Jana Rawlinson a remporté le 400 mètres haies des Championnats du monde d'athlétisme. Et deux mois plus tard, la Britannique Paula Radcliffe a remporté le marathon de New York neuf mois après avoir accouché.

Des dizaines d'athlètes de haut niveau sont mères. Les médaillées olympiques ne se comptent plus. L'équipe canadienne comptera au moins quatre mères au Jeux de Vancouver: les fondeuses Sarah Renner et Aleisha Cline et les hockeyeuses Beckey Kellar et Hayley Wickenheiser.

Et Clijsters ne serait même pas la première à remporter un tournoi du Grand Chelem ; Evonne Goolagong et Margaret Smith-Court étaient déjà mères lorsqu'elles ont conquis leur dernier titre majeur, respectivement en 1980 et 1973.

Être mère et championne n'est plus une exception. La bonne question serait-elle devenue : la maternité procure-t-elle un avantage?

La plus grande douleur

Les experts n'ont mesuré aucune différence significative au plan physiologique. «En fait, les avantages spécifiques liés à la maternité, au plan cardiaque notamment, sont compensés par le gain de masse corporelle», explique Jonathan Tremblay, professeur de physiologie de l'exercice à l'Université de Montréal.

«Au bout de quelques mois, si elles n'ont pas complètement arrêté l'entraînement pendant la grossesse, les athlètes retrouvent leur forme d'avant. Bien sûr, elles doivent s'astreindre à un travail spécifique pour retrouver leur mobilité, rééduquer leurs muscles en fonction de leur sport et de ses exigences, mais il n'y a pas de différence fondamentale.»

Il en va tout autrement au plan psychologique. «Aucune douleur n'est plus grande que celle qu'on ressent pendant un accouchement», a rappelé Rawlinson, après son titre.

«La grossesse et l'accouchement sont effectivement très exigeants pour le corps et une femme devient plus forte psychologiquement après avoir vécu une telle épreuve. S'il s'agit d'une athlète de haut niveau, déjà compétitive et motivée, cela peut être un avantage», estime le Dr Patrick O'Brien, dans une étude du Comité médical du Regroupement des fédérations sportives britanniques.

Serena Williams, qui affronte Clijsters aujourd'hui en demi-finale, croit que sa rivale est d'autant plus forte qu'elle n'a rien à perdre. «C'est dans ces moments-là qu'on peut vraiment jouer son meilleur tennis. Je trouve aussi qu'elle est plus rapide qu'avant. Peut-être devrais-je moi aussi songer à avoir un enfant. Cela m'aiderait peut-être à gagner en mobilité sur le court...»

Et l'avenir?

En fait, il y a plus d'un avantage à avoir un enfant. Mylène Aubertin-Leheudre, professeur au département de kinanthropologie de l'UQAM, s'intéresse au vieillissement des athlètes.

«Avoir un enfant avant l'âge de 30 ans est bénéfique pour la santé d'une femme, explique-t-elle. Dans cette perspective, il est préférable de prendre une pause dans sa carrière pour avoir un enfant que d'avoir un enfant au terme de sa carrière, à un âge plus avancé.

«Cela dit, il y a des exemples d'athlètes qui n'ont pas bien géré la transition. Un peu comme l'ancien joueur de soccer Diego Maradona, chez les hommes, certaines athlètes seraient complètement incapables de reprendre leur carrière après avoir donné naissance à leur enfant.»

Kim Clijsters s'était retirée pour fonder une famille, sans aucune intention de reprendre la compétition. Elle aurait pu se laisser aller, prendre 20 kilos et s'amuser avec Jada et de son mari Bryan Lynch. Elle ne l'a pas fait.

La véritable mesure de son exploit est sans doute là.