Jean Charest a joué au chat et à la souris avec les journalistes sur la tenue d'élections depuis un mois. Il n'en est pas à ses premières armes, révèle un témoignage, resté inédit, sur son accession à la tête du PLQ.

Il y a une semaine aujourd'hui, le premier ministre Charest avait confirmé qu'il se rendrait en Chine pour diriger la mission économique de cinq premiers ministres, un voyage annulé lundi dernier. Au début de l'année, il avait soutenu maintes fois qu'il ne saurait y avoir d'élections en 2008, à cause des fêtes du 400e, et qu'elles n'étaient même pas acquises pour 2009.

Début 2007, juste avant de déclencher les précédentes élections, il avait soutenu qu'il ne pourrait lancer l'appel aux urnes avant le dépôt du budget fédéral. Le budget de Jim Flaherty est tombé bien après, juste dans la dernière semaine de sa campagne électorale.

Histoire d'une succession

Il y a 10 ans, à la démission surprise de Daniel Johnson, M. Charest avait nié avec énergie qu'il ait eu la moindre intention de faire le saut en politique provinciale.

À un conseil national du Parti conservateur, il avait martelé que, s'il avait choisi la vie politique, c'était pour travailler sur la scène fédérale. Il répétait qu'il venait d'acheter une maison de 488 000$ à Ottawa, et que même son épouse Michèle Dionne était contre l'idée qu'il passe à la tête du PLQ pour remplacer M. Johnson. Puis, il avait échappé: «À ce moment-ci, c'est non!»

Dans une intéressante série de témoignages, Mémoires de députés, diffusée sur le site de l'Assemblée nationale, Madeleine Bélanger, ancienne députée libérale de Mégantic-Compton, a révélé la semaine dernière une version assez différente des événements.

Le 2 mars 1998, elle se trouvait à Vancouver, chez des membres de sa famille. Vers 8h du matin, elle reçoit un coup de fil de son chef, Daniel Johnson, deux heures avant qu'il n'annonce officiellement, en conférence de presse, son départ de la vie politique.

«À 8h, le téléphone sonne, c'est M. Johnson», raconte-t-elle avec précision. Il explique alors à Mme Bélanger qu'il tenait à lui faire part, personnellement, de la nouvelle: «Je fais une conférence de presse cet après-midi et je démissionne comme chef!»

«Cela m'a donné un coup que j'ai eu de la difficulté à prendre! Je lui ai dit: «Qui va prendre la place?» poursuit Mme Bélanger. Il m'a dit: «C'est Jean Charest!»»

«Qui est allé le chercher?» a demandé la députée.

«C'est moi qui lui ai demandé de prendre la place», a alors expliqué M. Johnson.

«Est-ce qu'il y aura une course? Je ne le sais pas, mais moi je suis pour Jean Charest», avait conclu le chef sortant.

Quelques jours auparavant, M. Johnson avait envoyé son homme de confiance, Pietro Perrino, à des assises nationales du Parti conservateur, que dirigeait alors M. Charest.