La crise politique qui s'est jouée à Ottawa dans les derniers jours aura eu pour effet de raviver les «deux solitudes» présentes au Canada. C'est du moins ce qui ressort d'un sondage mené mercredi par Strategic Counsel pour le compte du Globe and Mail, auprès de 1000 Canadiens.

La stratégie de Stephen Harper, de dénoncer avec véhémence le pacte entre deux partis fédéralistes, les libéraux et le NPD, et les «séparatistes» du Québec semble avoir porté ses fruits, du moins en divisant davantage le Canada.

Dans l'ensemble du pays, par rapport aux résultats des élections du 14 octobre, les conservateurs gagnent sept points, pour atteindre 45% dans les intentions de vote, selon les chiffres de Strategic Counsel. Mais ces gains sont largement attribuables à l'Ontario et à l'Ouest du pays.

À l'inverse, au Québec, les troupes du premier ministre Harper perdent quatre points, pour atterrir à 18% dans les intentions de vote. Sans surprise, c'est le Bloc québécois qui profite de ce revirement, gagnant trois points, à 41%.

C'est aussi au Québec que la coalition PLC-NPD soutenue par le Bloc québécois obtient le plus large appui, plus d'un répondant québécois sur deux (55%) se disant favorable. Or, dans le reste du pays, les deux tiers (64%) de la population rejettent cette entente, ce «pacte avec le diable», comme l'ont surnommé les conservateurs.

Fait surprenant, si les électeurs conservateurs s'opposent massivement (95%) à une coalition PLC-NPD appuyée par le Bloc, les partisans libéraux et néo-démocrates ne sont pas unanimes sur la question: le quart des électeurs du NPD et 30% de ceux qui votent libéral affirment s'y opposer.

Toujours selon le coup de sonde du Globe and Mail, la moitié des Canadiens (51%) considèrent que les partis d'opposition ont tout à fait le droit démocratique de former un gouvernement de coalition advenant que M. Harper soit défait à la Chambre des communes. Cette proposition augmente à 69% au Québec, mais bascule dans l'Ouest, où 53% des électeurs considèrent que la formation de cette coalition se veut une tentative antidémocratique de renverser le gouvernement au pouvoir.

Le sondage a été mené avant la prorogation, hier, mais il semble bien qu'il s'agissait justement de la sortie de crise préconisée par les Canadiens, à 44%, devant la formation d'un gouvernement de coalition, à 25%, et la tenue de nouvelles élections générales, à 14%.

Si les Canadiens sont divisés à savoir qui doit porter la responsabilité de cette crise, les Québécois ont fait leur lit: 63% considèrent que les conservateurs en sont responsables, contre, par exemple, 53% des électeurs de l'Ouest qui estiment que le blâme revient aux trois partis de l'opposition.

Finalement, l'ensemble des Canadiens, au Québec comme ailleurs, s'entendent sur une chose: les libéraux devraient devancer en janvier, plutôt qu'en mai, leur congrès à la direction pour remplacer Stéphane Dion, selon 57% des répondants de ce sondage dont la marge d'erreur est de 3,1 points dans l'ensemble du Canada.