Les révélations de l'ancien ministre de la Justice, Marc Bellemare, quant aux interventions politiques pour la nomination des juges n'ont pas surpris l'ex-juge en chef Claude Bisson.

Depuis plusieurs années, jurisconsulte de l'Assemblée nationale, le juge Bisson se porte garant de l'imperméabilité du comité restreint qui, pour chaque poste de juge vacant, est chargé de scruter les candidatures reçues.

Par la suite, le gouvernement fait son choix parmi quelques candidats triés sur le volet. Le juge Bisson - il a dirigé pendant six ans la Cour d'appel du Québec - avoue «ne pas tomber en bas de sa chaise» quand il entend Marc Bellemare dire que des considérations partisanes peuvent alors intervenir dans le choix des magistrats.

Le comité de sélection est composé de trois personnes, un représentant du juge en chef - un juge venant du district judiciaire à pourvoir -, un représentant du ministère de la Justice et un dernier délégué venant du public. Ces comités identifient trois candidats possibles pour un poste, une «courte liste» qui est soumise au gouvernement. Pour Pierre Chagnon, bâtonnier du Québec, le Barreau fournit les noms des avocats pour siéger à ces comités de nomination. «Ce comité peut vouloir combler un ou plusieurs postes vacants. Il fait ses recommandations au ministre de la Justice qui transmet ses recommandations au conseil des ministres. C'est évident qu'à cette étape-là, c'est une décision politique de l'exécutif», explique le bâtonnier Chagnon. Les membres de ce comité doivent déclarer tout conflit d'intérêts. Pour Me Gagnon, il est «impossible» qu'un «argentier» partisan puisse ajouter un nom à la liste établie par le comité.

«Le ministre de la Justice ne pige pas parmi les 15 000 avocats du Québec pour trouver un juge... il y a un processus en place depuis plus de 25 ans. Et ce comité est en principe et en pratique à l'abri de toute partialité», souligne de son côté l'ancien juge en chef Bisson.

Dans le choix que fait le gouvernement d'un candidat sur les trois soumis, des interventions politiques peuvent survenir, mais dans tous les cas de figure, les juges choisis sont compétents, ils ont passé à travers un processus de sélection «très rigoureux».

Mais à partir de cette courte liste de candidats qualifiés, les choix peuvent être plus arbitraires, «le ministre prend sa décision sur ce qu'on lui dit sur tel ou telle personne», explique le juge Bisson.