Ce n'est pas vraiment une surprise que les sables bitumineux dérangent ou même irritent les Québécois. Le jour où, après de longues tergiversations, le Canada instaurera une politique de réduction des émissions de carbone, les vastes ressources hydroélectriques du Québec représenteront un actif incomparable, alors que les émissions de GES produites par l'industrie pétrolière seront un énorme casse-tête. Tout le monde s'entend là-dessus.

Ce n'est pas vraiment une surprise que les sables bitumineux dérangent ou même irritent les Québécois. Le jour où, après de longues tergiversations, le Canada instaurera une politique de réduction des émissions de carbone, les vastes ressources hydroélectriques du Québec représenteront un actif incomparable, alors que les émissions de GES produites par l'industrie pétrolière seront un énorme casse-tête. Tout le monde s'entend là-dessus.

Toutefois, les opinions qu'on entend ces jours-ci au Québec au sujet des sables bitumineux ignorent trop souvent la contribution qu'apporte l'industrie pétrolière de l'Ouest canadien à l'économie canadienne ainsi qu'aux mécanismes fiscaux de la confédération. Pour faire court, il est vital pour le Québec que l'Ouest canadien demeure en bonne santé économique.

Si jamais l'économie régionale de l'Ouest était frappée trop durement par une politique environnementale nationale, les dommages ne se limiteraient pas à l'Ouest, car son poids économique est tout simplement trop grand. En 2008, les Canadiens de l'Ouest représentaient 30,6 % de la population canadienne, mais contribuaient 37,5 % du PIB national. En fait, la part du PIB canadien représentée par l'Ouest est maintenant supérieure à celle de l'Ontario et presque deux fois plus grande que celle du Québec.

Le centre de gravité de l'économie canadienne glisse vers l'ouest. Cela a un impact sur les transferts fiscaux émis par le gouvernement fédéral, parmi lesquels on retrouve la péréquation.

C'est un passe-temps national que de chercher qui, parmi les provinces, y perd ou y gagne à l'intérieur de la fédération. À ce titre, notons qu'en 2009-2010, le Québec a reçu 8,4 milliards de dollars en paiements de péréquation, alors que dans l'Ouest, une seule province (le Manitoba) en a bénéficié.

Pour ce qui est des recettes et dépenses du gouvernement fédéral par province, ce sont l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique qui sont les seuls perdants nets à l'échelle nationale de 2000 à 2007. Par personne, l'Albertain moyen a donné près de 28 000 $ de plus au fédéral qu'il n'en a reçu. Pendant ce temps, chaque citoyen québécois recevait 3300 $, toujours sur une base nette.

Le but de tous ces chiffres n'est pas de conférer une quelconque autorité morale à quiconque, mais bien d'illustrer à quel point les économies régionales du Canada sont interreliées. Ce serait une grossière erreur que de croire qu'en imposant des restrictions à une région ou à une industrie particulière (l'industrie pétrolière de l'Ouest dans le cas qui nous intéresse), on n'affecterait pas le reste du pays.

Au Canada, les mécanismes nationaux de redistribution de la richesse ne peuvent pas fonctionner s'il n'y a pas de richesse qui est produite, et pour toutes sortes de raisons, c'est l'Ouest canadien qui est, de façon disproportionnée, la source de cette richesse.

Bref, l'industrie pétrolière est une partie fondamentale de l'économie du pays. Si jamais cette industrie venait à tomber sous les coups d'un éventuel plan de lutte contre les changements climatiques, l'impact se ferait sentir partout au pays, de même qu'au Québec. Qu'on le veuille ou non, tout le monde est dans le même bateau, et les contribuables québécois aussi.

Reconnaître cet état des choses ne veut pas nécessairement dire qu'on accorde à la croissance économique une priorité plus grande qu'à la réduction des émissions de GES. Toutefois, le chemin nous menant vers une véritable politique du climat est suffisamment tortueux pour ne pas l'encombrer d'attaques visant une industrie ou une région en particulier.

Il vaudrait mieux porter attention aux consommateurs d'énergie à la grandeur du pays, plutôt que de cibler uniquement les producteurs.