Comme la tâche est colossale ! Nous travaillons pourtant très fort, la Croix-Rouge ainsi que les autres organisations présentes dans l'hôpital universitaire de Port-au-Prince, mais nous devrons garder ce rythme encore bien longtemps, j'en ai bien peur. Tout de même, on voit une lueur apparaître au bout de ce long tunnel mouvementé.

Comme la tâche est colossale ! Nous travaillons pourtant très fort, la Croix-Rouge ainsi que les autres organisations présentes dans l'hôpital universitaire de Port-au-Prince, mais nous devrons garder ce rythme encore bien longtemps, j'en ai bien peur. Tout de même, on voit une lueur apparaître au bout de ce long tunnel mouvementé.

Les « trouvailles médicales du jour » nous semblent un peu moins graves qu'elles ne l'étaient dans les premiers jours. Mais il nous arrive encore de découvrir, dans ce lot de patients qui n'ont jamais eu cette chance d'avoir un lit décent ni un toit dans l'hôpital, des cas de fracture ouverte et infectée du tibia, blessure grave bien cachée sous un plâtre fait dans les premiers jours après le séisme. Tout à fait inconcevable pour un médecin bien formé, mais un peu compréhensible si on se met à la place des rares équipes médicales précaires qui étaient disponibles durant dans les heures suivant le désastre.

La coordination est chaque jour un peu plus fluide et efficace. Les organisations internationales présentes acceptent les forces et faiblesses de chacun, communiquent, organisent, planifient, s'entraident.

Les réunions se font parfois improvisées au passage, à l'extérieur au grand soleil, sur le coin d'un édifice, tout près de patients criant de souffrance sur des civières brisées, rouillées et malpropres. Les priorités sont nombreuses. Bien sûr, la réponse médicale et chirurgicale globale, mais aussi les besoins de base à tout individu. L'hôpital a finalement de l'eau à offrir aux patients depuis deux jours. Les canalisations coupées à la source ont compliqué le problème d'approvisionnement.

La nourriture aussi commence à faire son entrée dans cette petite cité universitaire. Plus de 5000 repas sont distribués par jour, assez pour nourrir les quelque 1500 patients estimés, ainsi que deux membres de leur famille. Les distributions de nourriture sont bruyantes et mouvementées, mais contrôlées.

L'hôpital de campagne de la Croix-Rouge est devenu très populaire ici. Nous avons un équipement non seulement abondant, mais bien adapté à cette situation d'urgence, fruit d'une expérience de plus de 10 ans avec les ERU (équipes de réponse aux urgences).

Nous recevons une dizaine de demandes chaque jour pour fournir une tente adaptée, des équipements particuliers, des pansements spécifiques ou des médicaments de base ou spécialisés. Chaque fois, nos partenaires sont impressionnés de notre niveau d'organisation et d'efficacité.

En quelques jours, nous avons réussi à fournir et installer les tentes, lits et équipements nécessaires pour abriter au moins le tiers des patients de cet hôpital, même ceux qui ne sont pas directement sous nos soins. Tout cela en plus de subvenir à nos propres besoins en installations pour notre clinique d'urgence, nos deux salles d'opération, l'unité postopératoire, l'entreposage, le système d'assainissement d'eau, les génératrices, etc.

L'équipe mixte canadienne et norvégienne peut bien être épuisée ! Certains sont irritables, voire désagréables avec leurs collègues, et s'en excusent après une bonne nuit de sommeil.

Par contre, les nuits sont souvent perturbées par les activités bruyantes dans cette cité universitaire. Pour les délégués qui ont préféré dormir sous leur dôme moustiquaire à l'extérieur parce qu'ils ne pouvaient plus tolérer leur voisin ronfleur, ceux-là doivent maintenant tolérer leurs nouveaux amis bien actifs durant la nuit, la population grandissante de rats...