À lire les journaux ces jours-ci, on pourrait croire que c'est le début de la Troisième Guerre mondiale. Mais non, juste les FrancoFolies qui changent de date. Il ne doit pas se passer grand-chose d'important au Québec pour qu'une telle annonce provoque autant de débats et de commentaires démesurés. Pourtant, ça ne devrait pas être le cas.

Tout d'abord, ce n'est pas la première fois que ça arrive. C'est arrivé en 2006, et personne n'en est mort. Ce que l'on reproche à Spectra, ce n'est pas de tenir les FrancoFolies pendant le Festival d'été de Québec, mais un mois AVANT. Si l'on comprend bien, le Festival d'été veut donc avoir le monopole non seulement sur ses propres dates, mais également sur toutes celles qui le précèdent!

L'argument principal du Festival d'été est qu'il leur serait difficile d'attirer des artistes de renom alors qu'ils seraient précédés par les Francos. Le Festival d'été étant l'un des principaux festivals québécois, si cela était vrai, l'inverse le serait aussi. Or, la programmation des dernières années le démontre bien: les FrancoFolies n'ont eu aucune difficulté à attirer des artistes de talent parce qu'ils étaient précédés (de deux semaines) par le Festival d'été. Dans sa campagne publicitaire bien en vue à Montréal, le Festival d'été misait notamment sur Sting, Placido Domingo, Kiss et Jeff Beck, des artistes que l'on imagine plutôt mal aux FrancoFolies! Bien sûr, il y avait aussi Pierre Lapointe, The Lost Fingers et Indochine, mais à part ce dernier groupe, on est loin de l'exclusivité.

À court d'arguments devant la presse, le maire Régis Labeaume s'est même substitué au gouvernement en reprochant à Spectra de réaliser des économies avec de l'argent subventionné. S'il s'est rendu populaire par son dynamisme, son franc-parler et son extraordinaire succès lors des célébrations du 400e anniversaire de Québec (un événement largement subventionné), disons simplement que le bon maire Labeaume n'a pas gagné en crédibilité avec cette déclaration.

Voilà ensuite que la Société Saint-Jean-Baptiste se met de la partie. Dans sa légendaire étroitesse d'esprit, plutôt que de voir la Fête nationale comme étant l'apothéose de deux semaines de célébrations de la francophonie, le comité de la Fête nationale voit dorénavant les FrancoFolies comme étant un concurrent. Faut le faire!

En fait, le déménagement des FrancoFolies tombe sous le sens, pour plusieurs raisons. Pour Spectra, au-delà des économies réalisées, l'organisation «back to back» de deux festivals se révèle beaucoup plus efficace.

En fait, s'il devait nuire à quelqu'un, ce serait plutôt à Juste pour Rire, dont les bénévoles sont souvent les mêmes que ceux de Spectra, et qui sortiront à peine de l'organisation de deux festivals quand viendra le leur. Juste pour Rire lui-même a d'ailleurs allongé les dates de présentation de ses galas et empiété allègrement sur le Festival de jazz, apparemment sans nuire à celui-ci. Dorénavant, Juste pour Rire ne sera plus coincé entre les deux festivals de Spectra et pourra, s'il y a lieu, poursuivre son développement vers le mois de juillet plutôt que juin.

Le Festival d'été de Québec est un festival mature, dont la réputation est excellente, et qui n'a aucunement besoin, pour avoir du succès, d'être protégé artificiellement par cette pathétique guéguerre de clochers opposant Québec à Montréal. Quant à la Fête nationale, elle demeurera la Fête nationale, sinon nous n'aurons que nous-mêmes à blâmer pour ne pas la célébrer adéquatement.

Si l'on devait craindre ce changement de date, ce serait plutôt du côté du Grand Prix de Formule 1 qu'il faudrait regarder, puisque ses dates changent d'année en année et pourraient être conflictuelles avec celles des FrancoFolies. Ce serait dommage. Les hôtels étant pleins durant le Grand Prix, la valeur ajoutée des Francos sur le plan touristique serait nulle.

Patrice Attanasio

L'auteur est conseiller en communication-marketing, spécialisé en commandite. Il n'a aucun lien d'affaires avec l'équipe Spectra.