Le débat sur le rôle des PPP en santé refait encore une fois surface ces jours-ci avec le projet du CHUM. Certains pensent que l'amoncellement d'erreurs dans le dossier du CHUM le rend finalement impropre à la formule PPP. Peut-être. D'autres pensent que, en dépit des erreurs commises, il faut éviter d'en faire une autre en renonçant à la formule PPP. De toute manière, si on veut abandonner la formule PPP, faisons-le pour les bonnes raisons.

Deux arguments économiques principaux sont soulevés ces jours-ci par les opposants au PPP-CHUM.Le premier argument: un hôpital est un ouvrage complexe qui devra être modifié et transformé au cours des ans en fonction des besoins et des progrès en médecine. L'erreur est subtile. Les modalités contractuelles des transformations ultérieures d'un grand hôpital peuvent très bien être incluses dans le contrat de partenariat.

Les avantages des PPP restent importants même et peut-être encore plus dans le cas d'ouvrages complexes. Leur grand avantage vient de la mise en concurrence des partenaires privés pour faire émerger les meilleures pratiques (gestion de risques, contrôle des coûts, maintien des infrastructures, développement de compétences à valoriser) et pour réduire le pouvoir des groupes d'intérêt politiques, bureaucratiques, professionnels, corporatistes et syndicaux aux dépens des patients et des contribuables.

Les opposants au PPP devraient nous expliquer pourquoi de nombreux pays ont adopté la formule PPP pour la rénovation, l'agrandissement, la transformation et la construction de leurs hôpitaux. Le plus grand chantier PPP en France est le Centre hospitalier sud-francilien: plus de 1000 lits, ouverture en 2011, contrat PPP d'une durée de 30 ans. Que dire de plus? Trop compliqué pour le Québec, mais pas pour les autres!

Le second argument: le taux d'intérêt sur les emprunts gouvernementaux étant plus faible que celui du secteur privé, le coût d'un bien ou service sera nécessairement plus faible s'il est produit par le secteur public. Il est vrai que le secteur public peut emprunter à des taux d'intérêt plus faibles. La raison: contrairement aux entreprises privées, le gouvernement a le droit et le pouvoir de lever des taxes ou impôts supplémentaires si ses projets sont des échecs.

Du point de vue des contribuables, ce droit de l'État a un coût bien réel, mais caché ou non comptabilisé: c'est la valeur de l'option financière consentie par les contribuables à l'État d'obtenir et d'exiger des fonds additionnels pour couvrir l'échec, voire la faillite du projet considéré. Le différentiel de taux d'intérêt est précisément égal au coût de cette option que détient le gouvernement.

Si les citoyens donnaient à une entreprise privée l'option de les «taxer» si elle se retrouvait en situation de détresse financière, elle pourrait se financer au même taux que le gouvernement. D'où l'erreur, subtile certes, mais claire et nette.

La crise du crédit fait actuellement mal aux PPP comme elle fait mal à bien des institutions et entreprises. Il faudra dans ce dossier, comme dans bien d'autres liés à cette crise, faire preuve d'innovation et de courage. Mais cette crise ne remet aucunement en cause le rôle fondamental des marchés et de la concurrence dans l'émergence d'une économie du secteur public plus efficace et plus prospère.

L'auteur est professeur émérite de sciences économiques à l'Université de Montréal et fellow du CIRANO.