Je suis la mère d'un petit garçon non oral de 5 ans atteint d'une malformation cérébrale qui n'a rien à voir avec l'autisme. Il fréquente une école spécialisée en déficience physique du réseau de la CSDM (école primaire Victor-Doré). Notre fils Thomas bénéficie de services d'orthophonie, d'ergothérapie et de physiothérapie. C'est un enfant qui a des besoins particuliers nécessitant des services professionnels afin de lui permettre de se développer avec ses déficiences. Notre garçon a été diagnostiqué en mars 2005 et il a été pris en charge par le Centre de réadaptation Marie-Enfant en octobre 2006. Dix-neuf mois d'attente alors qu'il était en plein développement...

Thomas fréquente la maternelle depuis septembre 2008. Depuis la rentrée, il a fait d'immenses progrès. C'est un privilégié de son école, car il est ambulant. La titulaire de sa classe a à son bord huit enfants handicapés, dont quatre en fauteuil roulant. C'est une classe turbulente, nécessitant une compréhension du diagnostic de chacun des enfants. Plusieurs, dont le nôtre, souffrent d'un déficit d'attention sévère accompagné d'hyperactivité, d'impulsivité et pour finir le plat, d'une déficience intellectuelle légère. La professeure, pour maintenir le navire à flot, est accompagnée d'une préposée qui lui donne un coup de main pour les soins d'hygiène corporelle. Un titulaire pour huit enfants avec diagnostic sévère. Huit élèves pleins de potentiel pour une enseignante au bord de la crise de nerfs. Très loin du ratio un pour un de l'école À Pas de Géant pour autistes!

 

Et je ne vous parle pas des écoles en déficience intellectuelle que j'ai visitées l'année dernière. Des ratios tout aussi élevés. Pas de service en ergothérapie ou en physiothérapie. Alors que les besoins sont plus que nécessaires pour plusieurs enfants handicapés intellectuels.

De l'orthophonie? Vous voulez rire... Le privé ainsi que le milieu de la santé se les arrachent. Pensez-vous qu'une orthophoniste fraîchement diplômée sera attirée par la déficience intellectuelle? Si elle s'y dirige, elle n'y restera que quelques mois. Frustrée de la qualité des suivis et de l'apport qu'elle peut donner à ses enfants qui ont des besoins criants, mais qu'elle ne peut voir que minimalement (et parfois uniquement que pour une première évaluation). Frustrant et surtout désolant aussi pour les parents démunis qui voudraient aider leur enfant non oral. Le pire dans tout ça: l'enfant.

La perception du public à l'égard du trouble envahissant du développement (TED) est malheureusement trop souvent généralisée par une forme rare d'autisme: le syndrome d'Asperger. Physiquement, ce sont tous des enfants qui ont une apparence normale. Il ont une facilité remarquable en mathématiques. En fait, ils font des choses extraordinaires, des accomplissements souvent dignes du livre des records. Rappelez-vous du jeune autiste de haut niveau Xavier Charland qui a remporté un stage dans un cabinet comptable à l'émission Le Banquier. Ou encore de Dustin Hoffman dans le film Rainman qui lisait deux pages simultanément.

Pour toutes ces raisons, les autistes ont la faveur du public. En plus d'être beaux, ils sont surdoués... La réalité est pourtant très loin de ce mythe. Leurs rapports avec les autres ne sont pas simples. Et leur handicap, car c'en est un, les exclut de la société.

Aux yeux du public, nos enfants handicapés physiquement et/ou intellectuellement ne feront jamais de choses extraordinaires avec leur corps brisé ou leur cortex amoché. Ils ne deviendront jamais coureurs automobiles, sauteurs à la perche ou Prix Nobel en chimie. Et pourtant. Ces enfants-là accomplissent des petites merveilles tous les jours. Malheureusement, seuls les parents et les intervenants sont témoins de cette petite cour aux miracles.

Pour que le petit train aille encore plus loin, les décideurs de ce pays doivent aller de l'avant et mobiliser les ressources en rendant l'accès aux services plus facile, en maintenant des services de qualité de façon équitable quel que soit le handicap de l'enfant et en soutenant les parents d'enfants différents qui se sentent bien esseulés et surtout, essoufflés.

Démontrer enfin pour vrai que le Québec est fou de ses enfants même les plus différents!

L'auteure habite à Montréal.