Obama est maintenant président des États-Unis. Il hérite d'une situation intérieure désastreuse et d'une politique étrangère où les amis se font discrets, sinon rares, mais où les trouble-fêtes risquent de se multiplier. Malgré tout, Barack Hussein Obama, en affichant son origine musulmane lors de sa prestation de serment, révèle une Amérique ouverte et tend la main au monde. C'est déjà tout un signal.

Le discours inaugural est d'abord et avant tout un exercice qui s'adresse au peuple américain. En cela, celui que le président Obama a prononcé hier n'a pas dérogé à la tradition. En même temps, au moment où le monde vit sa plus importante crise économique depuis les années 30 et où les États-Unis cherchent à redorer leur blason, ce discours était aussi attendu par des millions de personnes sur toute la planète. Elles ne devraient pas être déçues. Le nouveau président américain s'est dit prêt au dialogue avec toutes les nations et s'est particulièrement adressé au monde musulman, tout en avertissant les extrémistes qu'ils ne réussiraient pas à affaiblir l'Amérique et qu'ils seraient vaincus.

On le voit déjà, les questions de politique étrangère, et particulièrement celles qui concernent le monde musulman, seront au coeur des préoccupations de l'administration démocrate qui s'installe à Washington. Rien de plus normal, car l'Amérique demeure, et pour quelques décennies encore, la puissance dominante, aux intérêts mondiaux. Tant sur le plan économique que diplomatique, Obama et son équipe veulent agir avec audace et rapidité. Dès cette semaine, dit-on, le nouveau président enverra un puissant message en ordonnant la fermeture de la prison de Guantanamo. Il veut aussi, en nommant un envoyé spécial au Proche-Orient, montrer qu'il prend très au sérieux le règlement du conflit israélo-palestinien, une des sources principales de l'instabilité dans cette partie du globe, et aussi une des causes de l'incroyable antiaméricanisme qui sévit un peu partout dans le monde.

Résultats souvent fragiles

Remodeler la politique étrangère des États-Unis est un exercice périlleux, et Barack Obama en est sans doute parfaitement conscient. Rien qu'au Proche-Orient, 12 administrations démocrates et républicaines ont travaillé avec acharnement afin d'obtenir des résultats souvent fragiles. Le nouveau président n'a pas de recette miracle et son offre de dialogue avec tous pourrait se révéler difficile à mettre en oeuvre. En effet, après huit ans d'un régime Bush où la force a été pratiquement le seul instrument utilisé, comment pousser l'option diplomatique sans apparaître faible? Comment convaincre ceux qu'on a tant insultés, sinon menacés, qu'un jour nouveau vient de se lever? Comment dissuader ceux qui voudraient en profiter pour tester les nerfs de la nouvelle administration? (...)

Barack Obama et son équipe sont maintenant en poste. Tant le président que la secrétaire d'État, Hillary Clinton, et le secrétaire à la Défense, Robert Gates, devront au cours des prochains mois démontrer au monde que les États-Unis sont maintenant disposés à participer pleinement aux affaires mondiales en coopération avec les autres. Ils en ont le talent et l'intelligence. Le discours d'hier a montré la voie et ouvert des pistes. La nouvelle administration jouit déjà d'un formidable capital de sympathie dans le monde. Il faudrait maintenant le faire fructifier.

L'auteur (j.coulon@cerium.ca) est directeur du Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix affilié au CERIUM de l'Université de Montréal.