La réforme du Sénat est encore revenue sur le tapis ces derniers jours avec le nouveau dépôt par le gouvernement Harper la semaine dernière, pour une troisième fois, de son projet de loi destiné à limiter à huit ans le mandat des membres de la Chambre haute. Le gouvernement entend faire suivre ce projet de loi par un autre visant à élire les sénateurs.

La réforme du Sénat est encore revenue sur le tapis ces derniers jours avec le nouveau dépôt par le gouvernement Harper la semaine dernière, pour une troisième fois, de son projet de loi destiné à limiter à huit ans le mandat des membres de la Chambre haute. Le gouvernement entend faire suivre ce projet de loi par un autre visant à élire les sénateurs.

Je ne suis pas contre la vertu; je ne suis donc pas contre une réforme sensée et réfléchie du Sénat. Mais les réformes à la pièce du Sénat proposées par le gouvernement conservateur n'ont évidemment aucune chance d'aboutir tant elles se butent à des obstacles constitutionnels qui, dans le contexte actuel de la fédération canadienne, sont infranchissables.

Au lieu de faire perdre aux parlementaires un temps précieux à discuter de modifications inapplicables et d'une complexité infinie quant à leurs conséquences sur notre système démocratique, le premier ministre pourrait poser un geste d'éclat et de grande maturité politique, en accord avec les valeurs de notre temps, en faisant du Sénat un lieu exemplaire de l'égalité entre les hommes et les femmes.

Le chef du gouvernement, dont c'est la prérogative de choisir les sénateurs et les sénatrices, pourrait peu à peu établir la parité hommes-femmes au Sénat en faisant en sorte que les 105 sièges de l'institution soient graduellement, au fil des nominations, répartis comme suit : 53 femmes et 52 hommes.

C'est une suggestion que j'ai souvent faite au Sénat et qui me semble-t-il a été très bien reçue de toute part. On doit souligner qu'il y a actuellement 35 femmes sur 102 sénateurs et trois vacances. Et d'ici Noël, il y aura neuf autres vacances dont cinq hommes et quatre femmes. Nous pourrions donc arriver à Noël de cette année avec un total de 43 femmes à la Chambre haute. Soulignons de plus que dès juillet 2012, en raison des départs subséquents, le chiffre de 53 femmes pourrait être atteint.

À moins que nous changions la loi électorale de la Chambre des communes afin de fixer un nombre minimum de femmes - ce qui serait totalement inacceptable même si cela se fait dans certains pays africains, arabes et autres - il est hélas encore difficile de nos jours de convaincre les femmes de se lancer en politique. Le système ne leur facilite pas les choses. Les obstacles financiers ou familiaux sont encore trop grands.

La sous-représentation des femmes en politique est une tare inacceptable dans notre société en ce début du XXIe siècle. En établissant la parité hommes-femmes au Sénat, nous enverrions un signal fort d'encouragement à la plus grande et nécessaire participation des femmes à la vie politique. Cela, j'en suis convaincu, créerait un effet d'entraînement salutaire; nous enrichirions considérablement notre vie politique. C'est là, après avoir navigué pendant 45 ans en politique au Parlement fédéral, ma conviction profonde.

Jean Chrétien avait très bien saisi cet enjeu. Au cours de ses mandats successifs à la tête du gouvernement, il a à lui seul nommé quelque 33 femmes à la Chambre haute. Quand on sait que, depuis 1930 (depuis la décision du Conseil privé de Londres de permettre la nomination de femmes), seulement 79 femmes ont été nommées au Sénat, on peut dire que M. Chrétien a fait oeuvre de pionnier à cet égard.

Il suffirait donc d'un peu de bonne volonté politique de la part du premier ministre actuel pour entamer ce changement nécessaire et fondamental au Sénat. Ce serait là le véritable début d'une réforme du Sénat. M. le premier ministre Harper, le choix vous appartient.

L'auteur est sénateur indépendant.