La prise en charge par le Conseil du trésor des négociations de la rémunération des médecins, bien qu'elle aurait dû être effectuée il y a longtemps, est une bonne nouvelle. Enfin, un changement qui devrait permettre de ramener le bon sens dans les négociations. Ce que d'ailleurs souhaitent de nombreux médecins qui ne se sentent pas représentés par leurs fédérations.

Il importe que la négociation qui s'enclenche ne couvre pas uniquement le niveau de la rémunération des médecins. Le temps est venu qu'elle ait aussi comme objectif les besoins de la population.

Il faut en effet constater l'absence de progrès significatifs sur les plans de l'accès aux soins et de leur qualité, l'engorgement des urgences, les trop longues attentes avant les traitements, les insupportables reports des interventions, le suivi des patients et les carences dans les soins à domicile. Cela malgré l'injection au cours des dernières années de milliards dans la rémunération des médecins. Il s'agit là d'un lourd bilan au sujet duquel non seulement le ministère de la Santé mais également la FMOQ et la FMSQ ont chacun leur part de responsabilité.

Au départ, le gouvernement va devoir énoncer clairement ses grands objectifs tout comme pour les autres groupes rémunérés par l'État.

De plus, ces objectifs vont devoir être quantifiables et permettre que les résultats obtenus soient évaluables. Autrement, comme nous avons pu le constater, en l'absence d'évaluation, la situation risque de ne point changer et même de régresser.

L'amélioration de la performance des médecins doit se situer au premier plan. Les fédérations, de façon particulière la FMOQ, vont devoir accepter le fait que le mode actuel de paiement à l'acte doit être modifié. En effet, ce mode de rémunération hérité d'un passé révolu ne tient pas compte des caractéristiques et des besoins de la population. Il priorise le traitement des symptômes plutôt que leur cause. Il ne s'accorde pas avec les exigences de la prévention et de la médecine familiale, le traitement et le suivi des maladies chroniques, et les soins à domicile. Enfin le paiement à l'acte est inadapté au travail multidisciplinaire en équipe.

MODES MIXTES DE RÉMUNÉRATION

Deux changements doivent être apportés pour corriger la situation. En premier lieu, des modes mixtes de rémunération qui tiennent compte des différentes modalités de pratique et des caractéristiques des patients doivent remplacer le simple paiement à l'acte. De plus, le programme des activités médicales prioritaires en vertu duquel les médecins de famille consacrent une importante partie de leurs activités au sein des urgences a fait son temps. Il doit être terminé afin que ces médecins puissent pratiquer au sein de leurs communautés, près de leurs patients. En contrepartie, les spécialistes vont nécessairement devoir s'impliquer davantage dans le bon fonctionnement des urgences.

Je ne connais pas d'autre juridiction qui n'a pas modifié ses façons de rémunérer ses médecins. Il existe de bons exemples dont on pourrait s'inspirer.

Enfin il n'est plus acceptable que les négociations se déroulent comme par le passé en vase clos suivies de l'annonce d'ententes pour le plus grand bien du bon peuple. Pour éviter les incroyables excès qui ont récemment fait surface, les exigences de la transparence vont devoir s'appliquer à la santé comme à tous les autres secteurs de l'activité gouvernementale. De plus, le gouvernement ne peut plus ignorer les voix des nombreux médecins qui, malgré leurs efforts pour bien servir leurs patients, se sentent brimés dans leur pratique.

Du côté des médecins, s'ils souhaitent retrouver le respect des Québécois, ils vont devoir s'engager positivement et activement dans la négociation. Quant au gouvernement, il ne faudrait surtout pas qu'il recule devant les difficultés d'introduire les changements nécessaires. De part et d'autre, les deux parties doivent reconnaître que des changements fondamentaux sont plus que dus.