Monsieur le Premier Ministre Trudeau,Au cours des derniers jours, nous avons pu constater que votre gouvernement envisage de réduire l'indexation des transferts en santé de 6 % à 3 %, en instaurant parallèlement un financement dirigé en fonction de conditions déterminées unilatéralement par le gouvernement fédéral.

Ce faisant, votre gouvernement jette au panier l'idée de collaborer avec les provinces afin de corriger adéquatement les transferts fédéraux en santé. Aux yeux du Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU), il s'agit d'un bris de la promesse que votre parti nous avait faite directement lors de la dernière campagne électorale.

Nous tenons à vous rappeler les engagements écrits de votre propre parti, transmis au RPCU le 24 septembre 2015. Vous disiez qu'un « gouvernement libéral travaillera de concert avec les provinces et les territoires pour les aider à trouver des solutions à leurs défis, notamment la hausse du coût des soins dans une population vieillissante ». Vous ajoutiez la promesse d'une « réunion fédérale-provinciale en vue de parvenir à une entente à long terme sur le financement des soins de santé », prétendant pouvoir former ainsi « un meilleur gouvernement » que le précédent.

Il y a tout près d'un an, les Canadiens et les Québécois vous ont porté au pouvoir parce que vous avez su reconnaître qu'il était temps de réinvestir dans les priorités de la population et de cesser les chicanes stériles entre gouvernements à propos de la santé. Vous avez été élu pour faire contraste aux politiques du gouvernement précédent.

Or, l'orientation prise ces derniers jours quant aux transferts en santé s'inscrit dans la continuité de celle du gouvernement précédent, autant du point de vue des coupes que de la non-reconnaissance des compétences des provinces.

Votre orientation actuelle est donc incohérente avec le mandat qui vous a été confié. Vous devez, par respect pour vos électeurs de tout le Canada et pour les usagers du réseau québécois de la santé et des services sociaux, revoir cette orientation.

Vos prises de position actuelles sont d'autant plus surprenantes que les membres de votre gouvernement semblent conscients des enjeux actuels. L'un de vos ministres, Jean-Yves Duclos, prédisait dans une étude une explosion des dépenses publiques en santé au Québec avec le vieillissement de la population. Selon son étude, ces dépenses augmenteraient de 31 à 61 milliards de 2013 à 2030, passant ainsi de 43 % à 69 % du budget total du gouvernement du Québec. Votre ministre de la Santé a récemment mentionné, à juste titre, que « les soins de santé ne constituent pas un enjeu partisan » et que « ce n'est pas quelque chose sur lequel nous devons nous disputer, mais collaborer ».

Devons-nous vous rappeler que, depuis l'instauration de la loi fédérale sur la santé, le gouvernement fédéral n'a cessé de diminuer sa contribution, passant d'environ 50 % à l'origine à, si rien n'est fait, 18 % dans un avenir rapproché ? À ce rythme, les provinces, dont le Québec, ne pourraient offrir un système de santé universel, gratuit et accessible.

Il faut absolument trouver une solution à ce désengagement du gouvernement fédéral dans le système de santé. Ce sont les provinces qui donnent les services et, en tant que représentants des usagers du Québec, nous n'accepterons pas une telle réduction.

Il nous importe donc de vous ramener aux promesses que vous nous aviez faites lors de la dernière campagne électorale et par lesquelles vous vous engagiez à un réinvestissement adéquat et une approche collaborative.

Considérant que vous avez été élu sur la base de cette vision de la santé pour le Canada et le Québec, considérant également l'ampleur des problématiques que le réseau québécois de la santé et des services sociaux vit en raison de ce désengagement financier, nous croyons qu'il est crucial pour votre gouvernement de tenir promesse.

Au final, c'est d'abord et avant tout dans l'intérêt des usagers que nous vous demandons de prévoir des transferts en santé qui favoriseront les soins et les services auxquels les Québécois ont droit.