La Stratégie québécoise de développement de l'aluminium 2015-2025 vise à doubler la transformation de l'aluminium d'ici 10 ans. Est-ce réaliste ? Oui, mais à certaines conditions.

Tout le monde connaît les grandes alumineries québécoises, mais sait-on qu'il y a ici 1400 manufacturiers actifs en transformation d'aluminium, employant près de 15 000 personnes et évoluant dans maints secteurs d'activité, dont les plus importants sont les industries de la construction et du transport ?

Cette grappe industrielle, la deuxième en importance au Québec après celle de l'aérospatiale, réalise chaque année 5,5 milliards de dollars de livraisons.

Peut-on porter la valeur de ces livraisons à 11 milliards d'ici 2025 ?

Dans le cadre des consultations menées par le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal sur l'avenir du secteur manufacturier, le moment est bien choisi pour établir les conditions de réussite de la Stratégie québécoise de développement de l'aluminium.

C'est en misant sur l'intérêt supérieur du secteur de la transformation et en soutenant la mise en place des meilleures conditions pour les entreprises que la Stratégie pourra atteindre son objectif.

L'industrie québécoise de l'aluminium évolue dans un environnement globalisé où la concurrence est très forte. Les transformateurs québécois, s'ils veulent se hisser parmi l'élite, doivent impérativement devenir des acteurs de classe mondiale, au même titre que Rio Tinto, Alcoa et Alouette, les grands producteurs d'aluminium actifs sur notre territoire.

Compte tenu du fait que les coûts de fabrication et de transport des manufacturiers québécois en transformation d'aluminium sont élevés, ils doivent choisir l'excellence et ne pas chercher à concurrencer des produits bas de gamme provenant d'autres marchés.

EXPORTER DAVANTAGE

La taille du marché québécois limite la croissance soutenue de nos entreprises. Pour devenir des entreprises gagnantes, les transformateurs doivent exporter davantage. Ils doivent aussi innover et mettre l'accent sur des produits à très haute valeur ajoutée. Nous connaissons très bien les potentialités de l'aluminium, car on en produit depuis des décennies : il est temps maintenant de faire fructifier cette expertise en visant haut et loin.

Malgré l'intense concurrence, certains transformateurs réussissent à faire progresser annuellement leur chiffre d'affaires de plus de 5 %. Des entreprises comme Verbom, Groupe Tremblay ou encore Raufoss Canada, qui a annoncé tout récemment l'agrandissement de son usine de production de pièces de suspension d'automobiles en aluminium forgé à Boisbriand, illustrent bien qu'il faut investir pour croître.

Pour faire en sorte que la filière québécoise soit reconnue pour la qualité de ses produits et son caractère innovateur, il faut aussi miser sur le design, la créativité et le marketing pour mettre en marché des produits novateurs qui rejoignent et anticipent les besoins des utilisateurs. Le Québec s'illustre déjà de façon spectaculaire dans le secteur culturel, il pourrait performer tout aussi bien en design industriel. De jeunes ingénieurs, architectes et designers ne demandent pas mieux que d'être créatifs et de mettre la main à la pâte, encore faut-il leur confier des projets qui pourront faire rayonner l'expertise et le talent d'ici.

FAIBLE EMPREINTE CARBONE

L'aluminium est un matériau aux propriétés exceptionnelles : sa légèreté, sa faculté d'être recyclable et son potentiel en matière d'alliages performants en font l'un des métaux les plus attrayants sur le marché. Sur le plan environnemental, le Québec dispose d'une hydroélectricité abondante, une source d'énergie plus propre que l'électricité produite à partir de combustibles fossiles générateurs de gaz à effet de serre qui alimentent de nombreuses alumineries sur le marché international. La faible empreinte carbone de l'aluminium québécois devrait servir à mettre en valeur les produits d'aluminium fabriqués ici.

Conquérir de nouveaux marchés, notamment à l'étranger, nécessite des efforts et des ressources souvent hors de portée pour les PME de moins de 100 employés. En concluant des partenariats et des alliances pour accroître leur force de frappe, elles augmentent leurs chances de succès. C'est d'ailleurs l'un des principaux facteurs de succès pour assurer la compétitivité des entreprises de la filière.

Enfin, les donneurs d'ordres publics et privés ainsi que leurs partenaires peuvent accélérer le développement de solutions novatrices en intégrant l'aluminium dans les projets d'infrastructures, notamment par l'entremise des appels d'offres. Le critère du « plus bas soumissionnaire conforme », en n'accordant pas assez d'importance aux qualités de durabilité et à la performance à long terme, sous-estime trop souvent la prise en compte du cycle de vie total des projets d'infrastructures. Rien de mieux que de belles réalisations pour créer un effet d'entraînement. À quand le lancement de projets pilotes incorporant l'aluminium pour établir la réputation de notre savoir-faire ?