Après la conclusion du Forum social mondial (FSM) et à l'aube de l'ouverture du Forum mondial de l'économie sociale qui se tiendra du 7 au 9 septembre au Palais des congrès de Montréal, il nous apparaît opportun de saisir l'occasion pour réfléchir à l'impact de nos choix individuels et collectifs sur le devenir du Québec.

Au cours des dernières années, nous nous sommes mobilisés collectivement pour tenter de résister tant bien que mal à l'opération de destruction massive de tous les espaces de gouvernance où les élus locaux devaient partager le pouvoir avec les acteurs de la société civile : organismes communautaires, syndicats, citoyens et gens d'affaires.

Après deux ans de commission Charbonneau, le gouvernement libéral a quand même décidé de redonner le pouvoir exclusif aux élus et d'éliminer les instances de gouvernance participative caractérisant le modèle québécois. Cette gouvernance à l'échelle régionale (Conférences régionales des élus) ou locale (Centres locaux de développement) reposait sur le partage du pouvoir, mais aussi sur la responsabilité commune de trouver des solutions originales aux défis des communautés. L'abolition de ces « structures » et de leurs équipes a raréfié le financement des entreprises collectives et leur accès à des expertises techniques essentielles à leur développement.

Au même moment, nous subissons les politiques d'austérité les plus importantes de notre histoire.

Ces politiques remettent en cause l'accès à des services publics de qualité, notamment en santé et en éducation, et fragilisent des secteurs-clés de l'économie sociale québécoise tels que les centres de la petite enfance et l'habitation communautaire.

La dernière année nous a également offert l'occasion de tester notre seuil d'indignation avec le scandale des Panama Papers et la multiplication médiatique des exemples d'évasion fiscale, toujours réalisée par les plus riches de la planète qui ne veulent pas payer leur juste part à la collectivité. Quand on regarde par ce bout de la lorgnette, nous avons le sentiment de vivre dans une période de grande noirceur.

Heureusement, malgré ce contexte trouble, les citoyens ne baissent pas les bras. Pendant que certains poursuivent la lutte politique pour changer le système économique et politique, d'autres développent des entreprises collectives pour répondre à des besoins sociaux ou pour faire face aux défis environnementaux.

Nous sommes, en effet, au coeur d'une période de grande effervescence entrepreneuriale où l'unité de mesure de la réussite n'est plus exclusivement monétaire. Les jeunes entrepreneurs d'aujourd'hui sont de leur temps. Quand on prend le temps d'écouter, on les entend parler de partage, de collaboration, de coopération, d'innovation, de communauté, d'impact social et environnemental.

Les jeunes entrepreneurs d'aujourd'hui ne misent pas uniquement sur l'État pour régler les problèmes économiques, sociaux ou environnementaux. Ils sont aussi conscients que nos défis collectifs ne peuvent trouver des réponses uniquement dans des initiatives individuelles privées. Ils savent bien que ce n'est pas en additionnant les intérêts individuels qu'on réussira à créer du bien commun. Même s'ils comprennent que l'État et le secteur privé ont un rôle à jouer, ils sont résolument tournés vers l'action collective et la communauté. Ils n'attendent personne pour développer des entreprises collectives et sociales dans tous les domaines. Et ça marche !

Le Forum mondial de l'économie sociale représente une belle occasion de découvrir cette nouvelle génération d'entrepreneurs collectifs en émergence.

Il est impressionnant de voir le nombre et la diversité des entreprises collectives créées ces dernières années partout au Québec comme Craque-Bitume, Cohabitat, la coopérative La Mauve, Coop Carbone, Pépinière & Co, Lange Bleu, la Guilde des développeurs de jeux vidéo, l'Esplanade, Code 3, UTILE, Marché solidaire Frontenac, coop Alina, les Urbainculteurs... Si le visionnement du film Demain vous a donné confiance en l'avenir, connaître les initiatives en marche au Québec et ailleurs renforcera ce sentiment.

Et si, par bonheur, il vous prenait l'envie de faire partie de ce mouvement collectif, vous pouvez poser au moins une action concrète telle que préférer une entreprise d'économie sociale lorsque la possibilité existe ; investir dans un fonds de travailleurs pour vos REER ; faire un don pour un projet collectif sur une plateforme de sociofinancement ; choisir une institution financière en accord avec vos valeurs.

À la Caisse d'économie solidaire Desjardins, nous sommes dédiés, depuis 45 ans, au financement des entreprises collectives au Québec, ce qui nous fait dire que les épargnes de nos membres servent à financer les paradis sociaux, pas les paradis fiscaux. Même si ça ne règle pas tout, nos choix individuels ont un impact réel et positif sur notre société. Critiquer, c'est bien ; agir, c'est mieux !