Le gouvernement fédéral s'est fait prendre par surprise. Plusieurs feux orange de la fin de 2015 ont tourné au rouge en ce début d'année 2016.

Les prévisionnistes ont tous réduit leurs perspectives de croissance réelle de l'économie canadienne de moitié, grosso modo de 1 point de pourcentage pour 2015 et 2016, respectivement. Nous serions maintenant dans une situation de « stagnation séculaire », autrement dit embourbés dans une période prolongée de morosité économique.

De plus, la débandade des prix du pétrole a entraîné avec elle le plongeon du dollar canadien. Le gouverneur de la Banque du Canada nous a d'ailleurs avertis récemment que ce panorama pourrait nous accompagner pour quelques années. Et ce n'est pas une nouvelle baisse du taux directeur de la Banque qui va changer beaucoup la donne.

Tout cela a bien sûr des conséquences négatives importantes sur le plan budgétaire du gouvernement fédéral. Chaque point de pourcentage de moins de croissance économique implique un manque à gagner annuel de quatre milliards en revenus budgétaires.

La relance promise par les infrastructures publiques au prix de déficits « modestes » risque de ne pas s'avérer suffisante.

Le plan n'est manifestement plus à la hauteur de la situation. La lune de miel du gouvernement fédéral risque de tourner court rapidement s'il s'en tient à son programme économique élaboré dans un monde bien différent où l'économie allait beaucoup mieux.

COMMENT RELANCER L'ÉCONOMIE ?

Si cette situation perdure, il faut travailler non seulement sur des mesures de relance conjoncturelles (quitte à augmenter temporairement les déficits prévus), mais également des mesures structurelles. Une des avenues suppléant l'investissement public pourrait être un redosage de l'assiette fiscale, autrement dit une réforme Godbout « à la canadienne ». 

Rappelons-le, la commission Godbout avait recommandé en 2015 que le gouvernement du Québec recalibre son système fiscal pour privilégier la taxe sur la consommation (hausse de la TVQ) tout en diminuant les autres taxes. Ce redosage permet de taxer ce que nous consommons plutôt que ce que nous gagnons.

Au fédéral, l'impôt des particuliers représente la moitié des revenus du gouvernement, l'impôt des sociétés 15 %, et les revenus de TPS, un peu plus de 10 %. Il y a donc une marge de manoeuvre pour changer le dosage des ingrédients de la recette du gâteau fiscal ! On pourrait ainsi annuler les baisses de TPS de deux points de pourcentage décrétées durant les 10 ans de pouvoir du gouvernement Harper, une décision qui remettrait près de 15 milliards dans les poches du gouvernement fédéral.

Même trame générale que le rapport Godbout au Québec. Ce seul redosage des sources de revenus pourrait générer environ cinq milliards de revenus supplémentaires.

C'est l'équivalent des revenus budgétaires fédéraux évaporés à cause du point du pourcentage de croissance du PIB perdu attribuable à la révision à la baisse des perspectives économiques. Ces sommes additionnelles pourraient permettre au gouvernement de diminuer le fardeau fiscal des particuliers ou encore bonifier les investissements publics pour doper la relance.

Le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, a fermé la porte récemment à une hausse de la TPS pour endiguer la hausse accrue du déficit à cause de la stagnation de l'économie canadienne. Mais à la lumière de la nouvelle réalité économique, avec des taux d'intérêt déjà au plancher, a-t-on maintenant le luxe de ne pas envisager cette stratégie du gros bon sens ?