Défendre par une loi d'enregistrer des déficits budgétaires reflète un désir de prévenir à tout prix l'enlisement dans l'endettement public qui mènerait en fin de compte à une hausse en catastrophe du fardeau fiscal et à une performance économique plus faible.

Cela reflète aussi la peur viscérale qu'un certain laxisme engendre une complaisance envers les petits déficits qui deviennent de plus en plus gros et qui s'accumulent d'exercices financiers en exercices financiers. C'est aussi nier les bienfaits d'une politique budgétaire qui cible des déficits dans les années de vaches maigres pour soutenir l'économie et des surplus dans les années de vache grasse. Mais cette façon de faire ne dicte pas quelle doit être la taille du gouvernement. Que le gouvernement soit relativement petit ou gros, on veut qu'il gère avec beaucoup de prudence en visant un léger surplus budgétaire.

Cependant, quand on ajoute à une telle contrainte législative à celle de ne pas hausser les taux de taxes et impôts, on cherche à éviter à tout prix une hausse de la taille relative du gouvernement. On veut empêcher que le ratio des dépenses totales du gouvernement au PIB n'augmente au fil des ans. Une telle approche fait en sorte que la taille du gouvernement (revenus/PIB et dépenses/PIB) diminuera graduellement.

Le débat public sur l'imposition de telles contraintes ne doit pas porter uniquement sur les bienfaits pour les contribuables de ne pas faire face à des hausses de taxes et de faire face, de temps à autre, à des baisses de taxes. Il doit aussi porter sur les implications d'avoir un ratio des dépenses au PIB qui sera au mieux stable et qui diminuera probablement graduellement. Un parti politique prônant un tel environnement budgétaire doit expliquer conjointement ces deux dimensions aux électeurs : avoir un fardeau fiscal moins lourd et avoir relativement moins de services. Avoir moins de taxes n'implique pas automatiquement un plus grand bien-être pour la population.

Dans un tel contexte, il faut se demander quels services seront sujets à des coupes ou, tout au moins, à une réduction du taux de croissance des enveloppes budgétaires qui leur seront allouées. Y a-t-il des services qui seront en forte croissance ou dans lesquels on n'a pas suffisamment investi dans le passé ? Pensons tout particulièrement pour le gouvernement fédéral aux secteurs de l'environnement, de la formation de la main-d'oeuvre et des infrastructures publiques. Pensons aussi à l'augmentation des coûts reliés au vieillissement de la population.

En somme, si un parti politique désire réduire la taille du gouvernement, il doit aller plus loin que de dire que les contribuables seront moins taxés, il doit aussi expliquer quels services seront affectés par ce choix budgétaire.

Moins de taxes, mais aussi moins de services. D'un autre côté, si un parti politique décide de hausser la taille du gouvernement et d'offrir plus de services, il doit bien expliquer à l'électorat canadien comment les dépenses additionnelles seront financées et quelles en seront les conséquences sur les plans économique, social et politique. Il ne suffit pas de faire une dépense pour que le bien-être collectif soit automatiquement accru.

Dans les derniers dix exercices financiers, il a été possible de baisser le ratio des revenus du gouvernement fédéral au PIB de 1,7 point de pourcentage et de hausser le ratio des charges de programmes de 0,4 point de pourcentage parce que le ratio du service de la dette à chuté de 1,2 point de pourcentage (en raison de la baisse des taux d'intérêt sur la scène mondiale) et parce qu'en début de période on avait un surplus structurel de 1 % du PIB (13 milliards en 2005-2006).

Mais pour les cinq prochaines années, la situation sera fort différente. Le gouvernement fédéral n'a pas en main un important surplus structurel et on s'attend à ce que les taux d'intérêt montent graduellement. Selon le dernier plan budgétaire, le maintien d'un surplus très faible et d'un ratio des revenus au PIB relativement stable va nécessiter une baisse significative des charges de programmes de 0,5 point de pourcentage (10 milliards).

Cette dernière baisse devrait, selon le gouvernement Harper, affecter presque entièrement les charges directes de fonctionnement tout en maintenant inchangé le ratio de ses transferts au PIB, malgré la hausse des coûts reliés au vieillissement de la population. Il doit donc expliquer au grand public quelles sont les coupes dans cette catégorie de dépenses qui ont été faites ces cinq dernières années et celles qui devront être faites dans les cinq prochaines.