Le gouvernement a raison de s'attaquer au coûteux problème des «enfants fantômes» dans les services de garde. Mais il vise la mauvaise cible en pénalisant les parents.

Le projet de loi de la ministre de la Famille, Francine Charbonneau, obligera les responsables d'un service de garde (RSG) et les parents à signer une entente uniformisée définissant la prestation du service. Il sera interdit d'y inscrire des «renseignements faux et trompeurs».

L'accord tacite permettant actuellement à des parents de défrayer le coût d'une place cinq jours par semaine, mais d'utiliser le service trois ou quatre jours, sera puni. Une place ne pourra plus être réservée pendant des mois pour un poupon à venir. Une mère en congé de maternité, qui voudrait garder son aîné deux jours par semaine avec elle, devra réviser les modalités avec son service de garde. Le projet de loi ne vise toutefois pas les vacances ni les congés de maladie.

Les parents fautifs devront payer la totalité de leur place pendant trois mois (34,44$ par jour en milieu familial au lieu de 7,30$). Les RSG risquent s'exposent à une amende de 250 à 1000$.

L'ampleur du phénomène des enfants fantômes n'est pas connue. Le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance estime qu'en milieu familial, 8000 places sont occupées virtuellement par des enfants qui ne bénéficient pas du service. La Commission permanente de révision des programmes croit qu'il est possible de récupérer 50 millions annuellement en «optimisant» la présence réelle des enfants dans les services de garde.

Le problème du projet de loi est qu'il cible erronément les parents. Rien n'est prévu pour améliorer l'offre de garde à temps partiel - à l'origine du problème - qui répondrait davantage au besoin de plusieurs familles.

Les RSG risquent même de favoriser encore davantage les enfants qui veulent fréquenter leur service de garde à temps plein, plutôt que d'accommoder un enfant trois jours par semaine en se cassant la tête pour combler les deux journées restantes.

Comme travailleuses autonomes, les RSG ont le droit de choisir leur clientèle. Et, contrairement aux installations, elles ne reçoivent aucune subvention gouvernementale pour des places inoccupées. Les parents lésés pourront se plaindre au bureau coordonnateur, mais son pouvoir est limité.

Il est nécessaire de sensibiliser les parents et les services de garde à la problématique des enfants fantômes et du gaspillage de fonds publics qui en résulte.

Mais sachant à quel point il est difficile d'avoir une place à tarif réduit dans les services de garde, sachant que les parents prennent ce qui leur est offert, même si parfois, cela ne correspond pas à leurs besoins, pourquoi les sanctionner en plus? Il faudrait plutôt que les services de garde correspondent à leurs besoins.