Force est de le constater, le ministre de la Justice Peter MacKay collectionne les frasques. La photo récemment publiée où on le voit porter un t-shirt faisant l'éloge des armes à feu s'inscrit dans une série de décisions ou de déclarations qui doivent nous faire réfléchir sur le jugement de cet homme.

Pour sa défense, ce dernier a affirmé ceci: «Un ancien combattant canadien blessé en Afghanistan m'a approché lors d'une activité à Edmonton, il m'a remis un de ses t-shirts et m'a demandé de poser pour une photo. Comme j'ai passé beaucoup de temps avec des membres des Forces canadiennes, je n'ai jamais cherché à éviter une occasion de manifester mon appui à leur égard et à leur famille».

Pour Peter MacKay, le discours véhiculé est secondaire. Il est plus noble de plaire à un ancien combattant (dont je ne remets pas en question le sens du sacrifice pour son pays), quitte à arborer par le fait même un message qui n'est pas du tout en phase avec les valeurs canadiennes. Le moins que l'on puisse dire, voilà un raisonnement qui est plutôt étrange.

La façon qu'a le ministre MacKay d'apprécier la réalité a également été mise en lumière en juin dernier lorsqu'il avait maladroitement affirmé que les femmes ne postulent pas pour des postes à la magistrature, car elles craignent que ce travail de juge les éloigne trop de leurs enfants.

Un dérapage similaire avait également fait les manchettes quelques jours auparavant lorsque des courriels envoyés à ses fonctionnaires avaient illustré quelle était sa conception du rôle des hommes et des femmes dans la société.

Vraiment, ces sorties publiques de Peter MacKay doivent empêcher Stephen Harper de bien dormir, d'autant que ces dernières s'ajoutent à des prestations ministérielles qui ne passeront pas à l'histoire pour les bonnes raisons (fiasco des F-35, torture des prisonniers de guerre capturés par l'armée canadienne dans des prisons afghanes, nouvelle loi sur la prostitution, et j'en passe...). Toutefois, il n'a pas le pouvoir de le renvoyer réfléchir sur les banquettes arrières.

Union de la droite

Peter MacKay représente pour lui le lien encore frais entre l'Alliance canadienne et le Parti progressiste-conservateur survenu en 2003 pour fonder l'actuel Parti conservateur. Souvenons-nous que pendant plus d'une décennie, Preston Manning, Stockwell Day et Stephen Harper ont remué ciel et terre afin de parvenir à une union des forces de droite afin de mettre un terme à la domination libérale en place depuis 1993.

Pour l'analyste, il était clair que Jean Chrétien avait été en mesure de se hisser au pouvoir grâce à la division de ce vote. Les libéraux avaient en effet remporté des majorités en 1997 et en 2000 même s'ils n'avaient récolté respectivement que 38,5 et 41% des voix.

Pour y parvenir, cette fusion avait toutefois été grandement redevable à un mensonge de Peter MacKay au moment où il était devenu chef du Parti progressiste-conservateur en mai 2003. Il avait été en mesure d'atteindre une majorité absolue des voix en ralliant son opposant David Orchard contre la promesse de réviser l'Accord de libre-échange nord-américain et de ne pas envisager la fusion du parti avec l'Alliance canadienne.

La suite des choses est évidemment connue. Ainsi, il est possible de dire que sans Peter MacKay, Stephen Harper n'aurait peut-être pas eu la chance de devenir premier ministre, puisque les forces de droite seraient peut-être encore divisées. Bien qu'il soit pour le premier ministre un allié encombrant, Peter MacKay n'en constitue pas moins la clé de voûte qui lui a permis d'obtenir les clés du 24 Sussex. Encore une fois, tout porte à croire que Stephen Harper pardonnera à son collègue sa dernière frasque qui, si le passé est garant de l'avenir, devrait en commettre une nouvelle au cours des prochaines semaines.