Dans un billet publié dans La Presse, Steven Guilbeault et François Tanguay argumentent que la hausse de tarifs demandée par Hydro-Québec résulterait aussi du développement de La Romaine et du contrat qui lie la société d'État et TransCanada Energy pour la production d'électricité à partir du gaz naturel. Ces affirmations démontrent une méconnaissance du mécanisme de règlementation auquel est soumise Hydro-Québec.

Dans sa demande de fixation de tarif pour le 1er avril 2015 présentée le 5 août dernier, Hydro-Québec Distribution informe la Régie de l'énergie que les contrats d'approvisionnement que les gouvernements successifs l'ont forcée à signer avec des producteurs privés d'électricité depuis 15 ans - dont les producteurs d'énergie éolienne - lui procureront 14,0 TWh en 2015. Le reste proviendra de l'électricité patrimoniale qu'Hydro-Québec Production sera tenue de lui vendre à 2,84¢/kWh en 2015.

Comme Hydro-Québec Distribution ne prévoit pas, dans sa demande tarifaire, utiliser toute l'électricité patrimoniale disponible, le coût de l'électricité qui provient des centrales construites par Hydro-Québec Production depuis la création du Bloc patrimonial au tournant l'an 2000, ne peut, à plus forte raison, influencer la décision tarifaire du 1er avril 2015! C'est vrai autant pour l'électricité d'Eastmain-1-A-Sarcelles-Rupert que pour celle de la Romaine.

Selon MM. Guilbeault et Tanguay, on retrouve «dans cette demande de hausse de tarifs (...) les quelque 200 millions que nous coûte la centrale au gaz naturel non utilisée de TransCanada Energy à Sorel (somme estimée puisqu'elle est soumise à une demande de confidentialité).» Cette affirmation est exacte, mais non pertinente. Comme Hydro-Québec Distribution est règlementée sur la base des coûts, l'indemnité annuelle payée à TransCanada pour garder fermée sa centrale au gaz de Bécancour (et non de Sorel) n'a pas d'impact sur la hausse tarifaire demandée pour le 1er avril 2015, puisqu'elle est déjà incorporée dans sa structure de coûts.

Youri Chassin, dans une étude publiée en 2013 pour le compte de l'Institut économique de Montréal, a estimé à 14,1¢/kWh le coût total d'approvisionnement de l'énergie éolienne pour Hydro-Québec. La société d'État n'a pas besoin de cette électricité pour satisfaire la demande de sa clientèle québécoise. On ne saurait la blâmer, comme le font les deux auteurs, pour son refus d'endosser un choix politique très onéreux pour la société québécoise. Si l'éolien crée effectivement 5000 emplois comme l'affirment MM. Guilbeault et Tanguay, chaque emploi coûte 140 000$ par année à la collectivité. On n'a pas les moyens de se payer un tel luxe.