L'honorable Maxime Bernier a récemment remporté un «rodéo du cochon» à Saint-Isidore, en Beauce. Est-ce le genre de spectacle qu'un élu doit offrir à ses commettants? Doit-on vraiment l'en féliciter?

L'épreuve remportée par le député fédéral conservateur est un calque de la «course au cochon graissé» du Festival du cochon de Sainte-Perpétue, à l'affiche depuis 37 ans, et qui commence aujourd'hui.

Le Festival du cochon s'étend sur quatre jours, sans compter le «préfestival». Sur ces quatre jours, un après-midi - samedi - est consacré à la rituelle «course au cochon graissé». Cette activité met en vedette un représentant de l'espèce humaine, un porcelet bien graissé, une mare de boue, une benne en bois à l'intérieur matelassé, le tout dans une enceinte clôturée. Le but du jeu: attraper le porcelet à bras-le-corps et le mettre dans la benne dans le temps alloué.

Au son du départ, le concurrent humain se lance dans la boue à la poursuite du porcelet. Il est interdit d'agripper le porcelet par la queue, les oreilles ou les pattes. Par contre, il est permis de se jeter lui, de le plaquer contre la clôture ou contre la benne et de l'écraser dans la boue, tête comprise. Au moment de mettre le porcelet dans la benne, tous les moyens sont bons. Les sabots devant ou derrière, la tête ou le derrière en premier, peu importe.

Dans les vidéos amateurs de cette course folle, on entend, par-dessous les cris de la foule, ceux du porcelet. Des cris stridents. Au Festival du cochon, on m'a répondu que si le porcelet crie, cela ne signifie pas qu'il a mal. En effet. Toutefois, ces cris ne sont certainement pas des cris de plaisir. Quand on le caresse, le cochon grouine, il ne hurle pas.

Sensibles et intelligents

Les cochons sont des êtres sensibles, classés quatrièmes au rang de l'intelligence, bien avant les chiens, les chats et les chevaux. Ils ont l'intelligence d'un enfant humain de trois ans. De plus, vu la grosseur du cochon graissé, on constate qu'il ne s'agit pas d'un adulte. Accepterait-on une pareille course si elle opposait un homme et un chiot? Poser la question, c'est y répondre.

Au Québec, été rime avec festival (et, dans une moindre mesure, exposition agricole). Sur l'ensemble du territoire, on fête tout et rien: la galette, la musique, la poutine, le cochon... Chaque coin de pays ouvre tour à tour ses portes, rivalisant d'ingéniosité pour attirer les visiteurs. On met au programme spectacles, visites guidées, boustifaille, concours et compétitions. Il y en a pour tous les goûts. Il y a dans les festivals et les expos du Québec du beau, de l'excellent, du médiocre et du grotesque. Souvent, le tout réuni en un seul et même événement.

Dans une collectivité comme Sainte-Perpétue, par exemple, un festival est une manne. Il crée de l'emploi, il attire le tourisme et, d'année en année, la population et les festivaliers profitent d'activités et de spectacles qui autrement n'existeraient pas. Les gens de Sainte-Perpétue tiennent à leur Festival du cochon, et ils ont bien raison. Toutefois, est-il vraiment nécessaire de se rouler dans la boue avec un porcelet pour faire vivre un festival?

Les festivals et les villes et villages du Québec ont tellement plus à offrir que ce pauvre spectacle. Saint-Tite, Saint-Hyacinthe, Saint-Isidore, Calixa-Lavallée et autres municipalités où on offre en spectacle ces combats inégaux entre l'homme et la bête, valent aussi mieux que cela.

Sans parler de révolution, peut-être serait-il bon de revoir notre définition du divertissement?

Quant à l'honorable député, je ne le félicite pas. Surtout sachant qu'il a fait subir l'épreuve à d'autres porcelets, en s'entraînant, dans le but d'obtenir la première place.