L'itinérance chez les hommes et les femmes de Montréal est en croissance et les refuges débordent. Il n'y a malheureusement là rien de nouveau. On me dit souvent que nous devrions ajouter des lits dans les refuges ou ouvrir les sous-sols des églises pour héberger tous les gens dans le besoin. Mais si leur nombre augmentait encore l'an prochain, que ferions-nous? Ajouterions-nous des étages aux refuges?

Non, «l'entreposage» des personnes en situation d'itinérance n'est pas la bonne solution. S'il est nécessaire de continuer d'offrir des lits dans des refuges sécuritaires pour parer aux urgences sociales, cette approche ne diminue en rien l'itinérance. Il faut, au contraire, diminuer le nombre de lits en refuge et augmenter le nombre de places dans les programmes de transition et de logements abordables, avec le soutien qui s'impose.

C'est exactement cela qu'a réalisé la Mission Old Brewery. Il y a quelques semaines, nous avons réduit le nombre de lits en refuge de 44, transférant ces places dans notre programme d'accompagnement, qui comporte un service plus individualisé, afin de faciliter la réinsertion sociale. Ces lits s'ajoutent aux 113 autres qui sont déjà alloués à nos services de transition. Nous aidons ainsi au-delà de 500 personnes à sortir de la rue chaque année.

Éviter le dortoir

Les personnes sans-abri qui arrivent à nos portes pour la toute première fois sont obligatoirement dirigées non pas vers un lit de refuge, mais plutôt vers une place dans un centre résidentiel d'accueil, d'évaluation et de référencement, pendant une période de deux à trois semaines. Ces personnes ne verront jamais l'intérieur d'un dortoir de refuge. Près de 80% quitteront la Mission durant ce séjour et réintégreront la société. Les autres seront dirigés vers nos programmes d'accompagnement, dont la capacité totale est maintenant de 157 places. Bientôt viendra le jour où il n'y aura plus de lits de refuge à la Mission.

Les hommes et les femmes qui délaissent nos programmes se retrouvent souvent dans l'un de nos appartements à prix modique et reçoivent le soutien d'un intervenant ou d'un conseiller. Leur qualité de vie y est meilleure, et cela, à un coût moindre que la vie en refuge. Le problème est qu'il y a beaucoup plus de personnes qui veulent sortir de la rue que de logements abordables pouvant les accueillir.

En résumé, pour lutter efficacement contre l'itinérance, il est plus indiqué d'investir dans les programmes d'accompagnement et de soutien ainsi que dans les logements abordables que dans l'augmentation du nombre de lits en refuge. De cette façon, nous diminuerons le nombre de personnes qui passent des mois, parfois des années, dans la rue.