Ce texte est tiré d'une étude sur les référendums dans les pays fédéraux, publiée cette semaine par L'idée fédérale (www.ideefederale.ca).Il y a deux ans, le gouvernement d'Écosse a fait part de son intention de tenir un référendum sur l'indépendance à l'automne de 2014. Pendant qu'était publié un projet de loi affirmant l'autorité du Parlement écossais quant à la tenue d'un tel référendum, un processus de consultation publique se mettait en branle. Le gouvernement du Royaume-Uni a immédiatement remis en question la compétence législative du Parlement écossais relativement à l'adoption d'un tel projet de loi et a lancé par le fait même son propre processus consultatif.

Le 15 octobre dernier, à la surprise de tous, les deux gouvernements sont parvenus à conclure l'accord d'Édimbourg. L'accord prévoit le transfert au Parlement écossais des pouvoirs de légiférer en prévision d'un référendum, à la condition que celui-ci soit tenu avant la fin de 2014 et qu'il porte uniquement sur l'indépendance.

Quand on garde à l'esprit les longs et pénibles efforts de sécession menés dans de nombreuses parties du monde, y compris dans des pays libéraux et démocratiques comme le Canada et l'Espagne, deux faits revêtent une importance considérable: le gouvernement du Royaume-Uni a accepté le principe fondamental du droit du peuple écossais à déterminer, par référendum, s'il demeure ou non au sein du Royaume-Uni, et les gouvernements écossais et britannique sont parvenus à s'entendre sur le processus référendaire.

En Écosse, une des grandes questions débattues jusque-là consistait à déterminer si le référendum comporterait plus de deux options, peut-être elles-mêmes encadrées par plus d'une question. Le gouvernement indépendantiste du Scottish National Party (SNP) envisageait sérieusement la possibilité d'un référendum à options multiples, mais au bout du compte, il a retiré cette proposition, et un des éléments essentiels de l'accord d'Édimbourg est que le référendum portera finalement sur une question, l'indépendance.

Bien que la loi britannique ne régisse pas le processus écossais et que la Commission électorale du Royaume-Uni n'a par conséquent aucun rôle garanti au référendum du 18 septembre prochain, l'Écosse a décidé de demander à la Commission de se pencher sur la question proposée. La Commission a suggéré que la question soit modifiée. Le gouvernement SNP a accepté le nouveau libellé: «L'Écosse devrait-elle être un pays indépendant?»

Selon la Commission électorale, la clarté de la question n'est pas seulement affaire de syntaxe; elle dépend aussi du contenu de la proposition sur l'indépendance: «La clarté des modalités de réalisation de l'indépendance aiderait les électeurs à comprendre comment seront résolues les revendications rivales des participants à la campagne référendaire.»

Il s'agit là d'un commentaire intéressant, qui laisse entendre qu'il ne peut y avoir de véritables délibérations si les citoyens ne savent pas ce pour quoi ils vont voter. À la fin de l'an dernier, le gouvernement écossais a publié un livre blanc dans lequel il explique sa conception de l'indépendance. Rappelons que la principale critique formulée à l'égard du référendum de 1995 au Québec était que la proposition de souveraineté et de partenariat n'était pas bien comprise par les citoyens.

Ainsi, dans le cas de l'Écosse, nous avons vu à l'oeuvre des efforts consensuels de la part de deux gouvernements cherchant de bonne foi à s'entendre sur un processus démocratique juste et équitable. Le référendum mènera ou non à l'indépendance de l'Écosse, mais ce processus consenti par les deux camps jouera un rôle primordial pour plusieurs raisons, la première étant que les gagnants comme les perdants pourront faire confiance au résultat.

Par la suite, ce résultat digne de confiance contribuera à rendre plus consensuelles les négociations post-référendaires en prévision de l'indépendance, advenant une victoire du Oui. Et si le Non remportait la victoire, le résultat du référendum pourra servir de solide point de départ à une conversation continue dans l'ensemble du Royaume-Uni sur d'éventuels changements constitutionnels, et plus encore, sur un processus qui aura obtenu l'assentiment de tous.