Comment se fait-il que le Québec ait les pires statistiques en termes d'accès à un médecin de famille (plus de 25% des Québécois sont sans médecin de famille contre 8 à 11% au Canada anglais) alors que nous avons le ratio de médecins de famille le plus élevé du pays?

Comment se fait-il que le Québec ait les pires statistiques en termes d'accès à un médecin de famille (plus de 25% des Québécois sont sans médecin de famille contre 8 à 11% au Canada anglais) alors que nous avons le ratio de médecins de famille le plus élevé du pays?

Comment se fait-il qu'à peine 22 à 37% des Québécois qui ont la chance d'avoir un médecin de famille parviennent à le voir rapidement lorsqu'ils sont malades?

Il faut savoir que le Québec est la province où le pourcentage des médecins de famille se consacrant exclusivement aux soins de première ligne (cabinet, domicile) est le plus faible, soit 26%: comment expliquer cela?

Près de 37,5% des heures travaillées par les médecins de famille québécois le sont en milieu hospitalier, surtout dans les unités d'hospitalisation, nettement plus qu'ailleurs au Canada ou en Europe où ces tâches sont habituellement dévolues aux spécialistes. Cette tendance est aberrante lorsqu'on sait que le quart des Québécois n'ont pas de médecin de famille et qu'ils n'espèrent même plus de visites médicales à domicile lorsqu'ils sont en perte de mobilité ou en fin de vie. Le suivi à domicile des grands malades est en rapide disparition au Québec, alors que la population vieillit et souhaite éviter les hospitalisations. Les personnes âgées n'ont d'autre choix que de se présenter de façon répétée aux urgences. Et, on s'étonne que celles-ci soient débordées?

Des médecins famille... à l'hôpital

À la suite des orientations prises depuis 15 ans par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec en faveur de la pratique hospitalière des médecins de famille québécois, le temps consacré à la pratique de première ligne des jeunes médecins de moins de 10 ans d'expérience a atteint un plancher record de 37%. Alors que de nombreux médecins vieillissants prennent leur retraite, ce chiffre est inquiétant pour ceux qui rêvent de se trouver un médecin de famille parmi les jeunes finissants.

Nos jeunes médecins de famille travaillent très fort, mais dans les hôpitaux surtout! Soucieux d'éviter les bris des services hospitaliers délaissés par les spécialistes québécois, ils optent de moins en moins pour la pratique familiale de première ligne. Plus inquiétant, à peine 52% des médecins de famille qui comptabilisent 11 à 20 années de pratique travaillent en cabinet ou à domicile: on voit donc une cristallisation de la pratique hospitalière chez les généralistes québécois, un phénomène unique en Occident.

Ne devrait-on pas informer la population des conséquences sur l'accès à un médecin de famille des choix de nos décideurs depuis 15 ans? Sommes-nous tous en accord avec cette décision de faire de nos jeunes médecins de familles des médecins hospitaliers? L'hôpital doit-il être le principal sinon le seul lieu de services médicaux pour les patients âgés vulnérables?

Qui osera demander aux médecins spécialistes de reprendre une partie des activités hospitalières des médecins de famille pour remettre ceux-ci en première ligne, où les besoins sont criants?

Qui osera encadrer les fédérations médicales pour exiger un partage plus cohérent des tâches, alors que de généreuses enveloppes monétaires leur ont été récemment consenties.

Qui osera faire en sorte que tous les Québécois qui le désirent, les grands malades surtout, puissent avoir accès dès maintenant et sans délai à un médecin de famille, en cabinet ou à domicile et ce, sans bris de services dans les hôpitaux?

Qui?