Le Groupe de travail sur la formation de la profession infirmière avait comme mandat de se prononcer sur l'implantation du baccalauréat comme norme d'entrée à la profession. Dans un récent rapport, le président s'est dit incapable d'atteindre un consensus parmi les membres. Le contraire aurait surpris, car le groupe de travail comprenait plusieurs représentants d'intérêts corporatiste ou institutionnel.

Les infirmières trouvent le statu quo inacceptable et sont profondément déçues de voir cette décision reportée une fois de plus. L'exigence de la norme du baccalauréat ne devrait pourtant pas faire de doute:

1) Les soins sont de plus en plus complexes et exigent une formation de plus en poussée de tous les intervenants. Les infirmières ne font pas exception.

2) Compte tenu de leur complexité, il y a accord sur le fait que les soins doivent être produits par des équipes multidisciplinaires. Pour que l'infirmière soit considérée comme membre à part entière de l'équipe, elle doit détenir une formation appropriée. Si elle ne détient pas un baccalauréat, elle va continuer d'être considérée comme une subalterne par les médecins.

3) Il y a accord sur la nécessité d'une participation accrue des infirmières pour résoudre les sérieux problèmes d'accessibilité aux soins de première ligne. Les pays et les provinces qui ont pris cette voie sont les plus performants.

4) Pour répondre à la demande croissante de soins de longue durée, de soins à domicile et aux exigences du suivi des patients, les infirmières doivent assumer un rôle prépondérant à cet égard.

Le Québec est la seule province qui n'exige pas le baccalauréat. D'ailleurs, le président du groupe de travail, le Dr Pierre Durand, affirme dans son rapport personnel que le baccalauréat apparaît «comme un incontournable pour répondre aux besoins évolutifs de la population et pour améliorer la performance du système de santé».

Alors que dans tous les domaines, les standards de formation sont toujours plus élevés, il est difficile de comprendre pourquoi, au Québec, la profession infirmière fait exception. J'ai depuis longtemps l'impression que la contribution des infirmières aux soins des patients n'est pas appréciée à sa juste valeur. Ce sont pourtant elles qui assurent à bout de bras, 24 heures par jour et 365 jours par année, le fonctionnement continu de nos hôpitaux et autres établissements de santé.

Même si la décision à prendre est évidente en fonction des besoins des patients, le ministre a plutôt choisi d'annoncer une autre analyse «afin de confirmer les besoins du réseau». Une telle analyse peut être utile pour évaluer les besoins de diverses natures à être assumés par les infirmières et autres intervenants (soins sur le plan de l'hygiène, aide domestique, etc.) Elle ne justifie toutefois aucunement de reporter une autre fois la décision sur la formation.

Ce genre de fuite en avant témoigne d'une attitude humiliante et inappropriée à l'égard des infirmières. Pourtant, il existe là une belle occasion d'améliorer la situation des patients et de valoriser à juste titre la profession infirmière.