Vendredi dernier, trois diplômés de l'École Polytechnique ont fait paraître une lettre («Un bilan décevant») pour commémorer à leur façon le tragique évènement survenu il y a près d'un quart de siècle et, du même coup, pour manifester leur opposition aux armes à feu. S'il était légitime de vouloir rappeler un souvenir qui leur est douloureux, il m'apparait quelque peu indécent qu'ils l'aient fait en propageant des informations fausses ou parcellaires et démagogiques.

Si on leur accorde le bénéfice de la bonne foi, on peut quand même déplorer chez eux une méconnaissance de la loi sur le contrôle des armes à feu et une mauvaise lecture de l'évolution des crimes violents au Canada et au Québec depuis les cinquante dernières années.

Un élément qu'ils ont bien rapporté est qu'effectivement, le nombre d'homicides commis par arme à feu est revenu en 2011 à un niveau comparable à ce qu'il était au début des années 1960. Dans les faits, les homicides commis par arme à feu ont augmenté à partir des années 60 jusque vers la fin des années 70, pour ensuite afficher une tendance à la baisse jusqu'à maintenant.

Ce type de crime a diminué depuis quarante ans, bien avant la révision de la Loi sur les armes à feu dans les années 90. Il est tout à fait démagogique de relier le niveau actuel de ces crimes à l'enregistrement des armes sportives à partir des années 90.

Quelques autres commentaires du texte sont pour le moins confus, sinon faux. Contrairement à ce que les trois auteurs affirment, il est toujours obligatoire au pays d'être détenteur d'un permis pour posséder une quelconque arme à feu. L'acquéreur d'un premier permis ou d'un renouvellement doit nécessairement être soutenu par deux répondants et, au Québec, ce permis est délivré par la Sûreté du Québec, après enquête sur le requérant. Rien à voir avec l'obtention d'un permis de conduire!

Il est aussi faux de prétendre que le gouvernement fédéral a abandonné la surveillance de l'entrée des armes au pays. Il n'est certes pas dans le quotidien du gouvernement de voir à l'application des lois sur le terrain. Au Canada, c'est la GRC qui a le mandat d'examiner l'entrée et le commerce au pays de toute nouvelle arme ou de tout nouveau modèle d'arme. Toute nouvelle arme ou nouveau modèle doit être homologué par la GRC pour circuler au Canada.

Enfin, sur le fond, aucune étude sérieuse ou analyse statistique approfondie n'a pu établir une corrélation entre l'enregistrement des armes à feu et la baisse du nombre d'homicides. Si ces études existent, les opposants aux armes à feu devraient les faire connaître, plutôt que de perpétuer leur chasse aux sorcières qui n'a aucun fondement rationnel, ce qu'aucun n'a pu faire depuis les quinze dernières années.

Ce qu'on reproche ici au gouvernement fédéral, c'est d'avoir décriminalisé la possession simple d'armes sportives détenues par des citoyens honnêtes et responsables. Ce à quoi l'Assemblée nationale du Québec s'est opposée pour des raisons qui ont pu sembler nébuleuses, même pour la Cour d'appel.

Là où on devrait être inquiet, c'est que notre Assemblée nationale se soit opposée à l'unanimité, sans qu'aucun de nos 125 députés - qui devraient représenter toutes les tendances de notre société - n'émette la moindre réserve sur la nécessité d'une telle action. Se pourrait-il que nos députés soient eux aussi dépassés dans l'administration du droit?