À M. Bertrand St-Arnaud,ministre de Justice du Québec,J'ai pris connaissance du projet de loi 28 instituant le nouveau Code de procédure civile. L'article 692 de ce projet de loi permettra à un locataire de retarder jusqu'à trois mois son expulsion à la suite d'un jugement pour non-paiement de loyer. Cette mesure provoque mon indignation.

C'est facile et irresponsable de faire du «social» sur le dos des propriétaires et de fouiller dans leurs poches afin de compenser les compressions dans les budgets de l'État. 

J'aurais une question à vous poser: avez-vous déjà été propriétaire d'un immeuble locatif qui constituait votre gagne-pain? Avez-vous passé des heures, après votre travail, à téléphoner à vos locataires pour les supplier de bien vouloir vous payer le loyer dû? Et, lorsqu'ils ne décrochent plus, tenté en vain de les rencontrer et d'avoir une explication? Avez-vous eu l'occasion de nettoyer les dégâts des locataires fugitifs, qui ont pris soin de démolir votre appartement, parce que vous leur avez évoqué la possibilité de les dénoncer à la Régie du logement pour non-paiement de loyer? 

Et ces mêmes locataires savent très bien que vous baisserez les bras, car vous en avez assez perdu et qu'il vaut mieux sacrifier encore un peu de votre temps et d'argent pour essayer de relouer au lieu de lui courir après et dépenser à l'infini pour déposer une demande à la Régie, payer des frais d'huissier non remboursables, des frais de dépistage (car vos locataires disparaissent dans la nature), sacrifier des journées impayées pour se présenter à l'audience et découvrir qu'ils s'en moquent bien de la loi et ils ne se présentent même pas.

Nous, les petits propriétaires, nous sentons démunis et broyés par la lourdeur d'un système judiciaire désuet non adapté à la problématique. Citez-moi une chose qu'on pourrait se procurer sans payer (sauf le loyer dû à un proprio naïf). Pourrait-on avoir un tel projet de loi pour non-paiement de l'hypothèque ou des taxes municipales?

M. le ministre, allez voir ailleurs, comment dans d'autres pays, on gère le parc immobilier en location et les lois qui régissent les relations propriétaires-locataires. Sortez du Québec et allez voir en Suisse, en Allemagne ou autres provinces canadiennes comme l'Ontario. Personne n'est lésé dans ses droits, mais tout le monde s'en tient à ses obligations (les uns comme les autres). 

J'y suis allée et il n'y a pas de quartiers défavorisés qui crèvent l'oeil par la misère des immeubles et des infrastructures. Pourtant dans ces quartiers, la clientèle est parmi la plus pauvre du pays: immigrants, petits-boulots, familles nombreuses, chômeurs et des gens dans le besoin. La pauvreté n'est pas une raison pour léser l'autre impunément.