Il y a aujourd'hui un demi-siècle, à midi trente (heure de Dallas), John Fitzgerald Kennedy était assassiné par Lee Harvey Oswald. Ceux qui n'étaient pas nés ou étaient alors trop jeunes n'ont pas idée de la commotion que l'événement avait créée dans le monde.

Peut-être est-il difficile aussi pour ceux-là de comprendre ce que le président représentait et semait autour de lui. Un mélange de joie de vivre et d'optimisme, d'espoir et de promesse de renouveau, d'honnêteté et de solidité. Jeunes et beaux, lui et Jackie charmaient la planète.

C'est le mythe Kennedy.

On sait bien qu'en réalité, l'épopée de la dynastie Kennedy a été houleuse. Que JFK lui-même était chroniquement malade, qu'il avait une vie personnelle désordonnée, que son couple était fragile, qu'il a commis des erreurs. Toutes ces failles, on les expose à satiété aujourd'hui parce que c'est ce que réclame l'époque.

Est-ce que cela parvient à déboulonner le mythe, à le rendre caduc, infréquentable? Nous aimons croire que non.

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Le président a occupé la Maison-Blanche pendant 1034 jours. C'est le temps qu'il lui a fallu pour s'inscrire à deux reprises, de façon majeure, dans l'Histoire.

Son premier motif de gloire réside dans ce qui n'a pas eu lieu: une guerre nucléaire dont on ne sait dans quel état elle aurait laissé l'humanité. Il s'agit évidemment de l'affaire des missiles cubains, qui s'est réglée parce que deux hommes, Kennedy et Nikita Krouchtchev, conscients d'être au bord de l'apocalypse, ont su accepter des compromis et résister aux pressions de leur appareil militaire respectif - ainsi que de Fidel Castro, dans le cas du leader soviétique.

Visiblement, JFK avait appris de l'erreur de la baie des Cochons, une opération montée par la CIA sous Dwight Eisenhower et qu'il avait étourdiment autorisée, à peine installé dans le bureau ovale. Ainsi instruit, Kennedy sera également prudent en ce qui concerne l'implication américaine au Viêtnam, initiée là encore sous Eisenhower et que Lyndon B. Johnson portera plus tard au niveau que l'on sait: de 15 000 «conseillers» militaires en 1963 à plus d'un demi-million de combattants en 1968.

L'autre haut fait de Kennedy se matérialisera après sa mort. Le 25 mai 1961, il promettait au Congrès qu'un Américain marcherait sur la Lune avant la fin de la décennie. Neil Armstrong le fit huit ans plus tard, après un investissement de 160 milliards$US (valeur de 2013) et le concours de 400 000 travailleurs, de l'ingénieur à l'ouvrier. L'exploit scientifique, technologique, logistique, humain, demeure à ce jour la plus formidable aventure de l'espèce.

Au total, notamment à cause de sa mort prématurée et absurde, il est difficile de juger John Fitzgerald Kennedy comme on juge un autre président. Chose sûre, l'événement de Dallas a déchiré ce qu'il représentait, l'optimisme et l'espoir. En Amérique, quelque chose s'est brisé qui n'a jamais été complètement réparé.

Et il semble maintenant probable que Barack Obama, de loin le plus kennedyesque des présidents depuis lors - Yes, we can! - n'y parviendra pas lui non plus.