En réponse à l'éditorial d'André Pratte, publié hier, et intitulé «Le grain de sable».

Des manifestations hystériques

Comme le dit l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la différence entre la production de pétrole conventionnel et celle du pétrole des sables bitumineux, en qui concerne l'émission de gaz à effet de serre (GES), est négligeable. D'autre part, les sables étant responsables de 7,8% des GES au Canada, et le Canada en entier étant responsable pour 4% des émissions mondiales, il en résulte que les sables bitumineux du Canada sont responsables de 0,31% des GES de la planète. Les 99,69% restants sont donc produits par les centaines de millions de véhicules, les millions d'usines et de centrales électriques, les milliards de systèmes de chauffage, etc., sans compter les pets de vaches... Dans ces conditions, à quoi attribuer les manifestations hystériques à l'endroit des sables bitumineux? Si les sables bitumineux menacent la planète avec 0,31% des émissions de GES, alors la planète devrait déjà avoir succombé aux 99,69% des GES émis par d'autres sources.

Gérard Olivier

Des propos déformés

L'AIE n'est pas à la solde de l'industrie pétrolière, c'est vrai. Elle a tout de même été créée à la suite de la crise de l'énergie de 1973. Sa principale préoccupation est d'assurer l'approvisionnement en pétrole de ses pays membres au prix le plus bas possible. Après la crise de 1973, les pays fortement consommateurs de pétrole ont diversifié leurs sources d'approvisionnement en pétrole pour accroitre la concurrence avec l'OPEP, qui avait fermé le robinet pour faire monter les prix. Aujourd'hui, l'AIE se donne bonne conscience en traitant du grave problème des changements climatiques, mais son action réelle contribue à maximiser la production de pétrole, aujourd'hui comme hier. Plus l'humanité produit de pétrole, moins vite le prix de ce pétrole augmente, plus la consommation de pétrole augmente et plus les émissions de GES augmentent. Dans son éditorial, André Pratte interprète abusivement les propos de l'économiste en chef de l'AIE, Fatih Birol, quand il conclut que l'exploitation des sables bitumineux ne contribue pas à la hausse des émissions de GES. Il est vrai que, selon M. Birol, le surplus de GES émis par la production de pétrole avec des sables bitumineux, comparée aux puits de pétrole conventionnel, est petit. Pourtant l'Environmental Protection Agency a évalué que la production et le raffinage du pétrole issu des sables émettaient 82% plus de GES que le pétrole conventionnel. C'est en négligeant de tenir compte des GES émis par la combustion du pétrole issu des sables qu'André Pratte déforme le sens des propos de l'économiste en chef de l'AIE. Tant qu'une vision essentiellement économiste, et non pas environnementale, continuera à influencer les populations et à guider 

les gouvernements, l'humanité continuera à s'enfoncer dans la destruction de la nature. 

François Beaulé, Montréal