Hier, nous suggérions de recentrer le débat sur la retraite au Québec sur la suffisance du revenu de remplacement. Entre 20 et 30% de la population du Québec comme du Canada, surtout concentrée dans la catégorie des revenus moyens, est sur la voie d'évitement.

Ces travailleurs, en tenant compte de la pension de la sécurité de la vieillesse, du régime des rentes du Québec, de leur épargne personnelle et de leur participation à des régimes complémentaires, ne pourront vraisemblablement pas remplacer adéquatement leur revenu d'emploi par un revenu de retraite leur permettant de maintenir leur niveau de consommation. Le débat est bien enclenché au Canada sur cette question fondamentale de la suffisance, mais au Québec le travail reste à faire.

Le rapport D'Amours apporte une contribution exceptionnelle à l'état des lieux et au débat entourant l'avenir des régimes publics et privés. Les solutions qu'il propose ont d'ailleurs récolté un fort taux d'adhésion. 

Le mandat et les principales recommandations du rapport D'Amours s'adressent surtout à la pérennité des régimes à prestations déterminées et le choix éditorial du groupe d'experts est de souhaiter que ce type de régime, qui assure le revenu le plus stable et prévisible à la retraite, se perpétue et se généralise. 

Le rapport ne propose toutefois pas de façon d'atteindre cet objectif. Une chose est certaine, même en réglant les problèmes actuels des régimes déficitaires qui ne favorisent que 35% des travailleurs, dont près des deux tiers dans la fonction publique, le problème de la suffisance est loin d'être réglé.

Une seule mesure importante du rapport D'Amours traite de l'insuffisance du revenu de remplacement à la retraite: la rente longévité, qui cible l'insuffisance des revenus à la retraite pour les retraités de 75 ans et plus.

Les critiques à l'égard de cette proposition, originale aux premiers abords, ont fusé de toutes parts. D'abord du côté des employeurs, où l'on a vu ce nouveau régime comme une nouvelle taxe sur la masse salariale qui augmenterait l'écart déjà trop grand de compétitivité entre les entreprises du Québec et celles du reste de l'Amérique. Une taxe qui pourrait donc déplacer la création d'emplois vers des régions où les coûts de main-d'oeuvre sont moins élevés.

Et, à 4 milliards de dollars par année de cotisations employeurs/employés, on pourrait ajouter que cela représenterait une ponction importante dans les ressources financières de l'économie du Québec, jusqu'à 0,8% du PIB. Quand on observe les taux anémiques de croissance réelle des économies occidentales, on ne peut s'empêcher de penser qu'un tel sacrifice pourrait avoir un effet dépressif sur l'activité économique.

De surcroît, les prestations reçues par les retraités de 75 ans et plus en vertu de ce nouveau régime feraient diminuer de façon importante la contribution fédérale au titre de Supplément de revenu garanti pour les faibles revenus.

Mais le principal vice de cette proposition réside dans son universalité. Comment justifier en effet l'instauration d'un régime universel, où même les travailleurs les plus pauvres devraient cotiser en se privant de ressources financières dont ils ont besoin, alors que l'objectif est de cibler une catégorie bien précise de retraités?

S'il y a des solutions à l'insuffisance des revenus de remplacement à la retraite, la rente longévité n'en fait vraisemblablement pas partie, ni d'ailleurs tout autre politique de nature universelle. Des politiques ciblées comportant une approche multileviers sont plus appropriées.

DEMAIN:

Un bouquet de mesures