Alors que la température hivernale s'installe sur Montréal, difficile de ne pas penser aux personnes qui n'ont aucun endroit où habiter. Encore combien de saisons froides caractériseront-elles notre paysage urbain? L'itinérance n'est-elle qu'une composante inévitable de nos sociétés?

Si l'on se fie à l'histoire, il s'avère difficile de demeurer optimiste quant à l'itinérance. Toutefois, l'itinérance n'est pas immuable. Il existe des solutions. Alors, pourquoi ne pas nous empresser de les adopter?

Voilà justement le noeud du problème: le statu quo.

Premièrement, les gouvernements municipal, provincial et fédéral mettent régulièrement en place des stratégies, qui tendent toutefois à n'apporter qu'un faible taux de financement, sans compter le fait qu'elles ne sont pas coordonnées les unes avec les autres.

Deuxièmement, nous devons nous efforcer de nous pencher sur ce qui se fait à l'extérieur du Québec. Une conférence de l'Alliance canadienne pour mettre fin à l'itinérance s'est tenue à Ottawa la semaine dernière et a attiré plus de 650 délégués, là pour entendre d'inspirants conférenciers venus d'Europe, des États-Unis et du Canada.

 Des plans, concrets - pas des rêves - pour en finir avec l'itinérance, déjà implantés ailleurs, y ont été présentés et discutés. Des 650, une douzaine uniquement venaient de Montréal, pourtant à seulement deux heures de voiture.

Troisièmement, nous ne disposons pas de données et de statistiques fiables suffisantes sur lesquelles baser une planification et des décisions judicieuses. Combien de personnes itinérantes y a-t-il à Montréal? Nous ne le savons tout simplement pas. 

En l'absence de résultats de recherche rigoureux, il arrive souvent que certains défenseurs de la cause, pourtant bien intentionnés, lancent des chiffres qui attirent l'attention sur le problème: «30 000 itinérants à Montréal», «l'itinérance chez les femmes en hausse de 400%», «95 refus d'accès au refuge chaque mois» - mais ces chiffres doivent être soumis à un examen plus approfondi.

Quatrièmement, des gens sincères et bienveillants travaillent fort, disposant de très peu de fonds, au sein d'un vaste réseau d'organismes communautaires pour pallier les problèmes liés à l'itinérance. Leur passion est-elle orientée le plus efficacement possible, de manière à maximiser l'impact des ressources déjà en place et à sortir le plus de gens possible de la rue?

Voici les solutions:

D'abord, tous les gens qui travaillent dans le domaine de l'itinérance, de tous les secteurs, devraient être d'accord sur un point - l'objectif est d'enrayer l'itinérance. Ce but peut être atteint.

Ensuite, nous devons recueillir des données justes. Une fois que nous aurons une meilleure conscience de l'ampleur et de la portée du problème, nous pourrons mieux planifier, budgétiser et agir.

Puis, tous les niveaux du gouvernement devraient développer une stratégie coordonnée en vue de remédier à l'itinérance. Ils devraient de plus réattribuer les ressources existantes là où elles auront le plus d'impact et allouer les nouvelles ressources qui s'imposent.

Enfin, les organismes communautaires doivent jeter un regard critique et profond sur ce qu'ils font et sur leur manière de le faire. Nous devons nous demander comment utiliser plus judicieusement nos fonds afin de réduire le nombre de personnes qui utilisent nos services et collaborer davantage afin de faire en sorte qu'un jour, nous puissions réellement fermer nos portes.

C'est le meilleur des mondes pour ceux et celles qui sont ouverts au changement et aux méthodologies qui ont fait leurs preuves. Si nous nous accordons sur le fait que l'itinérance est inacceptable dans notre société, alors nous devons moralement nous lier et emprunter la voie menant à sa fin.