À en juger par leur conseil national du week-end dernier, les péquistes sont gonflés à bloc, encouragés par leur légère remontée dans les sondages, heureux de voir le débat public dévier vers une charte qu'ils réclament depuis longtemps, et qui fait oublier les vicissitudes gouvernementales, et à fond derrière leur leader... laquelle leur a donné en guise de cadeau de clôture un discours comme les aiment les militants - un discours optimiste et lyrique, marqué par de multiples références à l'«indépendance». (Un mot que le PQ remisera prudemment en campagne électorale au profit du terme plus rassurant de «souveraineté»).

Les libéraux, sans parler des caquistes, ne doivent pas s'illusionner: ils feront face à un parti très fort. Un parti doté d'une organisation bien rodée, soudé par la foi en un idéal mobilisateur, et extrêmement homogène du point de vue ethnolinguistique - une caractéristique qui facilite les choses dans la mesure où la diversité amène inévitablement des tensions et la nécessité d'accommodements.

Parmi les 500 militants réunis au centre des congrès, il aurait fallu chercher pour dénicher des gens qui ne soient pas d'origine canadienne-française.

On n'a pas de statistiques là-dessus, mais à en juger par les visages et les accents, le PQ semble compter dans ses rangs militants moins de représentants de minorités que dans les décennies précédentes.

C'est d'ailleurs ce qui conférait un ton un peu surréaliste à la résolution qui interdira dorénavant aux députés et aux futurs candidats du parti de porter des signes religieux visibles. On se demande bien ce que cela va changer au portrait de famille!

Cette résolution n'a été contestée que par deux militants, qui ont plaidé en faveur de l'inclusion. Elle a été adoptée quasiment à l'unanimité (moins cinq ou six voix très isolées).

Le PQ est resté le parti studieux qu'il a toujours été - beaucoup de monde aux trois ateliers sur l'économie - mais il a subi une sorte de métamorphose idéologique.

Le pragmatisme économique naguère porté par les Parizeau, Bouchard et Landry a fait place au militantisme vert.

Les environnementalistes «purs et durs» ont remplacé l'ancienne aile gauche. Les observateurs qui prédisaient la rétrogradation de la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, qui n'a cessé de susciter la méfiance sinon l'hostilité de l'industrie, se sont trompés: Mme Ouellet a eu droit à une mention favorable dans le discours de la première ministre, laquelle s'est elle-même jointe, le lendemain, à l' «ovation debout» adressée par une salle unanime à la ministre militante, celle-là même dont le collègue Alain Dubuc écrivait récemment qu'elle a transformé son ministère «en groupuscule militant hostile au développement.»

Daniel Breton, l'autre écolo radical, quoiqu'exclu du cabinet, en mène aussi très large comme responsable de l'électrification des transports, de même qu'Yves-François Blanchet, le bouillant ministre de l'Environnement.

Les militants péquistes ont approuvé dans l'enthousiasme le projet de loi qui risque de compromettre l'exploration minière et le moratoire sur le gaz de schiste, condamné l'importation du pétrole albertain par oléoduc, et enjoint le gouvernement à adopter la ligne dure envers Alcoa, qui menace de fermer ses usines au Québec à cause de l'augmentation des tarifs d'électricité.

Un avis contredit le lendemain par Jacques Parizeau, qui recommande au gouvernement de «céder», compte tenu des changements intervenus dans le marché mondial de l'aluminium.

Le thème de ce conseil national portait sur la richesse du Québec, «un territoire riche en ressources», comme le disait Mme Marois dimanche. Fort bien, mais devant l'humeur actuelle des militants péquistes, un loustic pourrait se demander à quoi diable peuvent bien servir nos ressources naturelles, si l'on refuse mordicus de les développer!