Le 7 août dernier, mon père est décédé. Quatre ans auparavant, le diagnostic était tombé, comme une gifle en plein visage: Alzheimer. En l'espace d'une minute, tout s'est écroulé autour de mon père. À partir de cet instant précis, la dépression, tout comme l'Alzheimer, a fait son chemin, petit à petit, sournoisement.

La deuxième gifle est arrivée peu de temps après. Pour sa sécurité, ainsi que celle de ma mère, ils ont dû déménager dans une résidence pour personnes âgées. Vendre sa maison, qui était tout pour mon père, a été un choc, il croyait pouvoir y finir ses jours paisiblement. 

Peu à peu, la maladie a progressé: pertes de mémoire de plus en plus fréquentes, difficultés de concentration, troubles du langage. Bien que mon père savait que ce jour allait arriver, il a reçu sa troisième gifle le jour où on lui a retiré son permis de conduire. 

À partir de ce moment, les journées ont souvent été un calvaire. Pour ma mère également, aidante naturelle. Dépressif, il disait que sa vie était finie. Lui qui adorait bouquiner, il a cessé de lire; lui qui aimait le hockey, il a cessé de regarder la télé. 

Mon père était croyant et pratiquant, et bien qu'une jolie chapelle était à sa disposition à la résidence, il ne s'y rendait pas. Pour ma mère, la tâche devenait de plus en plus ardue; en plus des corvées quotidiennes, elle devait aider mon père à s'habiller, à prendre ses médicaments, à se laver, se raser. Nous, ses enfants, lui rendions visite régulièrement, allions le chercher pour des sorties, mais à la fin, plus rien ne l'intéressait. 

À quelques reprises, il a clairement manifesté le désir de mourir. Nous étions impuissants devant tant de détresse et, naturellement, ne pouvions rien faire pour soulager cette douleur autant physique que psychologique. 

Puis, un matin, n'en pouvant plus, il a fait une tentative de suicide. Il a été admis à l'hôpital et son état s'est détérioré rapidement. Ces moments ont été pénibles pour toute la famille.

Moins de deux semaines après son hospitalisation, mon père s'est éteint. Si vous me demandez si mon père est mort dans la dignité, je vous réponds assurément NON! Aurait-il souhaité mourir dans la dignité? Bien sûr! Personne ne mérite de terminer ses jours de cette façon. 

Si le projet de loi sur l'aide médicale à mourir va de l'avant, je serai la première à faire rédiger un document notarié prévoyant mon euthanasie au moment opportun si je devais être affligée d'une maladie dégénérative. 

Je revendique le droit de mourir dans la dignité et d'éviter que les membres de ma famille immédiate ne se retrouvent à bout de souffle, à bout de ressources, pour finalement y laisser leur propre santé comme aidants naturels.