Madame la première ministre,

Je ne reviendrai pas sur le malheur qui s'est abattu le 6 juillet dernier sur tous les citoyens de la ville de Lac-Mégantic, pas plus que sur la question de savoir qui sont les responsables de cette tragédie. Les médias ont largement couvert la négligence de la compagnie Montreal, Maine&Atlantic (MMA), tout autant que les lacunes de la gestion des chemins de fer par le gouvernement fédéral.

Je voudrais vous demander de poursuivre sans relâche une politique proactive comme vous avez si bien su le faire jusqu'à présent en posant des gestes concrets pour venir en aide aux sinistrés de Lac-Mégantic. Comment faire? Tout simplement en nationalisant le canard boiteux qu'est la MMA, posant ainsi la première pierre d'une politique nationale des chemins de fer du Québec. Vous avez aujourd'hui une opportunité exceptionnelle de prendre le contrôle d'une ligne de chemin de fer qui fut, en son temps, le fer de lance du développement du Canada.

La MMA possède des actifs qui représentent les vestiges d'un tissu économico-social autrefois étroitement lié à la richesse de la région de l'Estrie. Sherbrooke et nombre de petites municipalités de cette région furent développées grâce au chemin de fer et encore aujourd'hui, les villes qui possèdent une emprise ferroviaire sont privilégiées dans une politique de développement industriel et de lutte contre le chômage.

Quelle belle occasion de faire cadeau aux Québécois de leur propre chemin de fer et d'utiliser ce moyen de développement toujours moderne à leur profit. Vous le savez bien, la politique ferroviaire du gouvernement fédéral a toujours été de favoriser l'économie du reste du Canada au détriment de celle du Québec. Toutes les emprises ferroviaires ont été créées pour la migration économique vers l'Ouest canadien, et ceci depuis l'ère de Macdonald et Cartier.

Nous avons permis au fédéral et aux compagnies CN et CP de fermer toutes les lignes ferroviaires québécoises sous le prétexte de non-rentabilité. Et bêtement nous avons transformé les emprises en pistes cyclables qui ne rapportent rien si ce n'est du plaisir aux adeptes du cyclotourisme.

La disparition de la MMA aura deux conséquences fâcheuses: la perte de l'accès le plus direct depuis Montréal jusqu'au Nouveau-Brunswick et un port pétrolier important, et la destruction d'un outil de développement indispensable pour l'Estrie. Remplacer le train par des norias de camions est loin d'être une solution écologique.

Madame la première ministre, j'aimerais vous entraîner dans mon rêve. Le Québec s'ouvre au développement d'un chemin de fer écologique, un réseau électrifié grâce à Hydro-Québec et aux technologies d'une compagnie qui nous est chère, Bombardier.

Prendre le train à Montréal ou à Québec et me rendre à Gaspé, à Lac-Mégantic ou au Saguenay dans des voitures confortables et dans des délais qui feront rougir de honte la piteuse Via Rail que nous offre parcimonieusement le fédéral.

Madame la Première Ministre, on peut toujours rêver, mais il faut aussi savoir sauter sur une occasion quand elle se présente. Le malheur de Lac-Mégantic, vous tend les bras...

Quelle belle promesse ce serait de dire aux citoyens de Lac-Mégantic que vous leur promettez de pouvoir se rendre bientôt en «Bombardier» jusqu'à Québec pour vous visiter...