Au Québec, l'espérance de vie à la naissance s'est accrue de façon soutenue au cours des dernières décennies. Elle dépasse maintenant celle du Canada dans son ensemble et se situe parmi les plus élevées au monde, soit autour de 82 ans. Uniquement depuis le début des années 90, la longévité moyenne des Québécois a augmenté de six ans.

Cette hausse de l'espérance de vie a été observée dans toutes les régions du Québec sauf au Nunavik. Cette région lointaine, constituée de 14 villages dispersés le long de la baie d'Hudson et de la baie d'Ungava comprend environ 12 000 personnes, dont plus de 90% sont inuites.

Des sources diverses nous permettent de suivre l'évolution de l'espérance de vie des résidents du Nunavik sur une période de plus de 60 ans. On remarque ainsi que de 1946 à 1971, l'espérance de vie est passée de 26 ans à 66 ans, mais n'a jamais dépassé ce seuil depuis. De sorte que l'écart de six ans qui séparait le Nunavik de l'ensemble du Québec en 1971 est passé à 15 ans en 2006.

Cette première hausse spectaculaire de 40 ans de l'espérance de vie au Nunavik s'explique par une diminution marquée des décès par maladies infectieuses (oreillons, rougeole, tuberculose) et par pneumonie et grippe.

Toutefois, à partir du début des années 70, l'espérance de vie se met à diminuer au moment où elle commence à rattraper celle de l'ensemble de la population du Québec. La hausse des suicides, des traumatismes non intentionnels et des décès par tumeurs et par maladies de l'appareil circulatoire explique en grande partie cette diminution de la durée de vie au Nunavik.

Alors que le suicide était un phénomène relativement rare chez les Inuits avant les années 80, le taux de mortalité associé à cette cause représente au Nunavik plus de six fois celui de l'ensemble du Québec pour les années les plus récentes. Les traumatismes non intentionnels, les maladies de l'appareil respiratoire et le cancer du poumon présentent également au Nunavik des taux de trois à six fois ceux du Québec.

Les retombées de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois signée en 1975 ne se sont malheureusement pas traduites pour les Inuits par une hausse de leur espérance de vie. Souhaitons que le développement du Nord, en plus de ses objectifs de créer de la richesse pour tous, permette également d'améliorer l'état de santé des populations locales, dont les Inuits du Nunavik.

Après tout, le Nunavik couvre le tiers du territoire québécois et près de la moitié du territoire visé par le développement nordique. Comme Québécois, pouvons-nous accepter qu'une partie de notre population puisse espérer vivre 15 ans de moins que la moyenne des Québécois?