Pauline Marois a récemment annoncé un investissement de 15 millions dans les soins palliatifs, incluant 4 millions pour l'ajout de «lits dédiés», notamment en CHSLD, une somme nettement insuffisante selon les intervenants du réseau. Quelques jours plus tôt, les médias rapportaient l'entente hors cour intervenue dans le dossier du CHSLD Saint-Charles-Borromée pour un montant de 7 millions, dont une portion servira à instruire les usagers sur leurs droits.

Malgré cette apparente sensibilisation sociale, les histoires d'horreur, allant des récits de maltraitance et de mauvais soins aux cauchemars bureaucratiques, se multiplient et ont poussé les libéraux à réclamer une commission parlementaire sur les conditions de vie des personnes hébergées dans les CHSLD. Une commission Vivre dans la dignité serait la suite logique de la commission Mourir dans la dignité, a affirmé la députée Marguerite Blais.

Il faut admettre que le gouvernement semble avoir perdu le contrôle de son réseau de CHSLD au moment le plus inopportun qui soit, alors que la demande est en pleine croissance et n'a pas encore atteint son point culminant. D'ici 2026, la proportion de personnes âgées de 65 ans ou plus, qui est actuellement de 14,4%, aura doublé pour atteindre près de 25%, selon les données l'Institut de la statistique du Québec.

Alors, utile une commission Vivre dans la dignité? Peut-être. Quoiqu'à lire le rapport Préparons l'avenir avec nos aînés publié en 2007 au terme d'une vaste consultation publique sur les conditions de vie des aînés, on peut soupçonner que les conclusions pourraient sentir le réchauffé. Un chapitre entier de ce rapport est consacré à des recommandations visant à améliorer la qualité de vie dans les résidences et CHSLD. On y évoque des évidences comme le respect de l'intimité et de la dignité, des soins d'hygiène réguliers et le service de repas chauds et d'aliments variés.

Je crois qu'il y a des limites à brasser du papier et accoucher de rapports qui iront manger la poussière sur les tablettes, que nous avons suffisamment ruminé la théorie et qu'il faut maintenant plonger dans le concret.

Et que veut dire passer à l'action? C'est d'abord reconnaître que la majorité des aînés sondés en 2007 ont exprimé le désir de rester chez eux le plus longtemps possible et que tous les spécialistes s'entendent sur les bienfaits du maintien à domicile. Il devient donc incontournable de repenser la façon dont les sommes sont allouées et de bâtir un solide réseau de soutien, d'augmenter l'offre de service, d'alléger la bureaucratie et de soutenir et épauler les aidants naturels par une aide financière et des mesures d'accommodement et d'assouplissement.

Quant aux aînés pour qui l'admission en CHSLD devient inévitable, il faut humaniser leur séjour. La certification et l'ajout d'inspecteurs sont des mesures valables, mais les sanctions n'ont pas réponse à tout. Il faut remplacer l'obsession de l'exploitation du temps par des gestes humains et empathiques, que les soignants ne demandent qu'à poser, comme prendre le temps de s'asseoir avec les aînés, de leur tenir la main, de soutenir leur regard, de les écouter raconter leurs souvenirs et donner vie aux photos qui ornent les murs de leur chambre.

Enfin, une réflexion, personnelle et collective, doit aussi s'amorcer sur ce que représentent pour nous les aînés. Ils sont moins glamour que le Plan Nord, mais la vieillesse n'est pas pour autant une tare et les aînés des boulets qu'on traîne aux pieds. Malheureusement, il est parfois bien pratique de déplorer le manque d'argent plutôt que d'ébranler nos propres perceptions...