Un témoin à la commission Charbonneau, Gilles Cloutier, a admis avoir fait élire maires et conseillers municipaux de dizaines de villes du Québec en utilisant une méthode clés en main, irrespectueuse des lois électorales, à la condition qu'ils s'engagent à accorder, durant leur mandat, tous les travaux de génie civil à la firme d'ingénieurs-conseils qui avait retenu ses services et payait tous les frais.

Après les révélations que plusieurs «grosses firmes» avaient triché en oeuvrant à Montréal et en participant illégalement au financement des partis politiques du Québec, voilà que certaines d'entre elles s'abaissent à devenir des fossoyeurs de la démocratie en mettant sur pied et en finançant des stratagèmes électoraux illégaux.

Depuis, l'opinion publique est portée à s'inquiéter que les travaux publics ne pourraient être réalisés si ces firmes sont pénalisées. Ce n'est pas exact puisque dans 90% de ces projets, la préparation des plans et devis et la surveillance de l'exécution de ces travaux peuvent être effectuées par de «petites firmes» spécialisées (de 30 à 100 employés).

C'est un mythe de penser que nous avons besoin au Québec uniquement de «grosses firmes» fourre-tout de 2000 à 20 000 employés pour la réalisation de projets publics. Grosses, leur pouvoir n'a pas de limite et avec leur gros budget de développement des affaires, elles bousculent les «petites firmes» qui, elles, ont des moyens limités pour faire leur promotion.

Il faut reconnaître la valeur des «petites firmes» dont les patrons s'impliquent personnellement dans la réalisation de leurs projets. Dans le domaine privé, les grands projets sont souventes fois réalisés par elles.

Les firmes d'ingénieurs reconnues coupables par la loi devront être punies. Voici ma suggestion.

Premièrement, l'Ordre des Ingénieurs doit agir, enquêter et suspendre tous les ingénieurs qui de près ou de loin ont participé à ces illégalités.

Deuxièmement, les firmes devraient perdre le droit de soumissionner pour une période de cinq ans sur tous les projets où la collusion a été démontrée. Si une ou l'autre des firmes se réveille avec des ingénieurs et techniciens en surplus, que ces individus spécialisés et compétents créent leur propre «petite firme» et oeuvrent à leur compte.

Troisièmement, les firmes devraient payer une amende égale au montant total des crédits d'impôt accordés par le gouvernement à tous les prête-noms qu'elles ont motivés à participer à cette illégalité. En plus, chacun de ces prête-noms devrait rembourser personnellement aussi les crédits d'impôt dont il a bénéficié.

Par contre, les partis politiques qui ont reçu ces contributions ne devraient pas être obligés de les rembourser. Ils ne peuvent être blâmés pour ce stratagème imaginé et mis en place par les firmes et les contributeurs. L'argent est déjà dépensé et un remboursement nuirait à la solidité financière des partis politiques.

Quatrièmement, les firmes de génie ayant travaillé pour Montréal et faisant partie de la collusion du partage des contrats devraient rembourser 20% des honoraires supplémentaires qu'elles ont perçus sur les contrats exécutés pour la ville, puisque les coûts des travaux de la ville ont été augmentés de 20% à 30% par rapport aux coûts normaux et qu'elles n'ont rien dit.

Cinquièmement, il serait juste que tous les dirigeants de ces firmes et les membres de leur conseil d'administration qui étaient en poste lors de ces malversations soient renvoyés pour une période de cinq ans et remplacés par des individus dont la compétence et la probité sont reconnues.

Si on n'agit pas radicalement et vite, on verra dans quelques années la tête de l'hydre ressurgir.