Chaque année, le Conference Board du Canada produit un bilan socioéconomique dans lequel le Canada est comparé, sous divers angles, avec 16 autres pays de l'OCDE. Son dernier bilan confirme que les politiques publiques canadiennes pour réduire la pauvreté et les inégalités sont inefficaces.

Ce bilan a de quoi en surprendre plus d'un, car il vient dégonfler de nombreux mythes sur le Canada. Que ce soit celui voulant que la pauvreté chez les personnes âgées ait été éliminée, celui associant directement emploi et sortie de pauvreté, ou encore celui affirmant que l'écart entre les riches et les pauvres demeure à peu près le même d'année en année, tous ces mythes ne résistent pas à l'épreuve des faits.

Certes, à une certaine époque, le gouvernement fédéral a su mettre en place des lois sociales qui ont fait diminuer la pauvreté et les inégalités socioéconomiques. Mais cette époque semble révolue. Selon les données du Conference Board, une personne sur dix vit dans la pauvreté au Canada. On parle ici de personnes sans emploi, mais aussi de personnes actives sur le marché du travail et de retraités. La situation des retraités est d'ailleurs particulièrement honteuse : leur taux de pauvreté a triplé en 15 ans.

Le gouvernement du Québec affirme souvent que dans le domaine de la lutte à la pauvreté et aux inégalités, le Québec s'en tire mieux que le reste du Canada. Certaines données figurant dans l'État de situation 2012 du Centre d'étude sur la pauvreté et l'exclusion tendent à lui donner raison - mais en partie seulement. Car après avoir fait effectivement quelques gains relatifs dans ce domaine entre 2000 et 2007, la situation du Québec s'est mise à se détériorer en 2008, avec la crise économique et financière.

D'autre part, on constate aujourd'hui que les 20% de ménages les plus riches ont six fois plus de revenus que les 20% de ménages les plus pauvres, et ce après les transferts gouvernementaux. En 1990, ce ratio était de 5,3 fois. Ce que cette progression indique, à l'instar d'autres indicateurs mesurant les inégalités, c'est que les riches s'enrichissent pendant que les pauvres s'appauvrissent.

Doit-on être surpris de tout cela? Bien sûr que non. En fait, c'est plutôt le contraire qui aurait été surprenant, après plus ou moins 30 ans de compressions et de coupes dans les programmes sociaux canadiens et québécois. Si rien n'est fait pour inverser la tendance, on continuera d'apprendre, rapport après rapport, que l'écart s'accroît entre les plus fortunés et les personnes au bas de l'échelle  et que la lutte à la pauvreté fait du surplace, quand elle ne recule pas.

À ceux qui seraient tentés de «se péter les bretelles» parce que le Québec performe mieux que le reste du Canada, il faut rappeler qu'aujourd'hui, il y a environ 750 000 Québécois qui ne couvrent pas leurs besoins de base, soit une personne sur dix. L'adage a beau dire « quand on se compare, on se console », l'existence de tant de pauvreté et d'inégalités dans une société aussi riche que la nôtre demeure une réalité scandaleuse.