En cette veille du 12/12/2012, la question ne devrait pas tellement être de savoir si le monde survivra à cette date fatidique que de savoir si nous avons simplement raison de vouloir y survivre à tout prix. Car c'est une chose de vouloir survivre, mais c'en est une autre de savoir pourquoi l'on y tient tant.

Que ce soit dans le discours apocalyptique du 12/12/2012 ou dans le discours écologiste tant à la mode présentement, la survivance qu'on nous propose n'est la plupart du temps qu'une façon de passer à travers une catastrophe, qu'elle soit d'origine naturelle ou environnementale, mais sans plus! De tels discours éludent la question philosophique pourtant essentielle: en tant qu'illustres représentants du vivant sur Terre, qu'y faisons-nous donc?

Au lieu d'essayer d'abord de comprendre le monde dans notre rapport à celui-ci, on préfère, semble-t-il, se limiter à penser tout de suite à notre survie. Pour nous rassurer, certains écologistes nous proposeront par exemple de manger tous les matins un petit bol de céréales bio ou de composter nos déchets. En faisant cela religieusement, nous pourrions selon eux continuer de vivre de longues années en toute tranquillité et en toute sécurité sur Terre, tout comme on le serait dans un salon zoné tout confort.

Et pour ce qui est de l'imminence actuelle de la fin du monde, évidemment la chose est plus compliquée: si on est riche, on peut prendre l'avion la journée même du 12/12/2012 et observer la fin du monde du haut des airs, ou bien, si on est pauvre, tout simplement se mettre la tête dans le sable toute la journée tout en croisant les doigts.

Mais de tels agissements seraient la résultante d'esprits bornés: ils sont ceux de la bête survivance et non pas ceux de la vie elle-même. Car vivre, c'est bien autre chose. C'est même un défi perpétuel. Et, de la même façon qu'on ne pas peut vivre sans douleur ni angoisse, on ne peut vivre sans danger. Le danger est inhérent à la vie.

Cette vie est fragile et elle peut nous glisser entre les doigts à tout moment, 12/12/2012 ou pas. Tout comme n'importe quel autre être vivant sur Terre, en tant qu'humains, nous sommes sur une corde raide. Non seulement notre corps est soumis à toutes sortes de dangers (virus, bactéries, etc.), mais un vent solaire défavorable, une météorite frappant la Terre, une éruption volcanique soudaine, un terrible tremblement de Terre, et c'en est fini de nous en quelques minutes.

La sécurité n'existe pas sur Terre et elle n'a jamais existé. Mais c'est précisément dans notre intrépidité devant de tels dangers et notre fascination devant la folle démesure de la nature qu'on a toujours trouvé le plaisir de vivre, de même que la motivation nécessaire à nos recherches. Et le magnifique vivant que nous sommes n'a certes pas à se limiter ici à sa simple survie.

Notre vie sur Terre est peut-être courte et risquée, mais c'est d'autant plus un grand et magnifique voyage d'exploration! Car n'oublions pas que nous sommes, à très petite échelle, l'expression du Tout de l'univers versus le néant. Armés d'un tel privilège, nous aurions alors bien tort de craindre quoi que ce soit.

Mais cet univers n'a cependant pas besoin de nous pour exister et nous devons nous le rappeler chaque jour. L'esprit humain, si grand et si extraordinaire soit-il, n'en restera toujours que l'éphémère et fragile miroir. Ayant alors compris cette grande vulnérabilité qui est la nôtre, nous serons en mesure à l'avenir non seulement d'en faire le moteur de nos questionnements existentiels afin de mieux orienter nos vies, mais elle sera l'antidote parfait à tous ces charlatans annonciateurs de mauvaises nouvelles.