Chère Mme Marois, vous avez annoncé cette semaine en grande pompe votre désir de mettre les médecins à contribution dans votre effort d'équilibrer les finances du Québec puisque nous sommes des privilégiés.    

Explicitement, vous avez mentionné un rattrapage salarial de 8% pour les années à venir. Votre déclaration laissait entrevoir implicitement que ce rattrapage était annuel, laissant l'impression qu'une augmentation annuelle de 8% était indécente dans la conjoncture actuelle, ce qui est d'ailleurs vrai. Dans la réalité toutefois, ce n'est qu'à la fin de l'entente que la somme des augmentations annuelles aura atteint un taux de 8%.

Ceci ressemble étrangement à plusieurs de vos déclarations et promesses électorales où la réalité implicite dépassait largement ce qui était véhiculé explicitement.

Dans les faits, vous me demandez de faire un effort. Vous semblez éviter de mentionner la taxe santé fixée à 1000$ dans mon cas, l'augmentation de mon taux d'imposition (déjà bien élevé) de 1,75%, l'absence de crédits aux activités culturelles et sportives de mes enfants...

Revenons plutôt à mon domaine d'activités. Alors que vous me demandez cet effort, vous disposez d'une armée de gestionnaires - armée étant un qualificatif très modéré à mon avis -, dont l'ingéniosité à développer des procédures et règles et à inventer des formulaires tous plus machiavéliques les uns que les autres vous permet de ralentir constamment notre productivité et surtout le temps consacré aux patients, anéantissant du même coup toutes les augmentations dont nous pourrions bénéficier.

Pire, lorsque nous réussissons à prendre le dessus sur ce processus administratif, votre armée en change à nouveau le fonctionnement pour nous anéantir à nouveau. Dans notre système actuel, le volet administratif ne cherche aucunement à améliorer la productivité (donc les soins directs), mais bien à le rendre toujours plus compliqué, justifiant ainsi l'augmentation continue de gestionnaires n'apportant aucun bénéfice aux patients.

Vous participez ces jours-ci à la conférence des premiers ministres. J'ose espérer que, dans votre souci actuel d'économies chez les nantis, vous vous présentez à cette conférence seule, que vous vous y êtes rendue dans votre véhicule personnel en mettant de l'essence ordinaire, que vous couchez dans un motel à49 $ la nuit et que vous apportez votre lunch.

Puisque cette description de votre voyage relève plutôt du scénario d'un film d'horreur, je pourrais vous faire une proposition beaucoup plus réaliste: vous pourriez assister à cette conférence par vidéo-conférence dans la quiétude et la sécurité de votre bureau tout en permettant au trésor endetté du Québec d'économiser 1 ou 2 millions de dollars. En ajoutant à cette économie des milliers d'exemples de gaspillage semblable, la dette devrait être en mesure de disparaître à courte échéance.

Notre société étant devenue non confessionnelle, il semble que vos souvenirs de notre enfance soient quelque peu altérés puisque vous nous laissez croire que «charité bien ordonnée commence par les autres».