Les reportages sur l'industrie porcine publiés récemment dans La Presse sont pertinents et illustrent les défis d'un secteur économique complexe. Nous saluons ce genre de journalisme encore trop rare. Mais à la lumière de nos interventions auprès des acteurs de ce secteur, nous croyons utile d'ajouter quelques détails sur son fonctionnement.

Comme dans plusieurs pays, la production agricole québécoise reçoit le soutien de divers mécanismes provenant de la gestion de l'offre ou de mesures de sécurité de revenu. C'est aussi un secteur caractérisé de manière structurelle par une diminution du nombre de fermes depuis 30 ans et une croissance de la production globale, provenant des gains d'efficacité essentiels à sa compétitivité, surtout dans des marchés ouverts sur le monde.

Le secteur porcin a été particulièrement touché par une série de facteurs défavorables tels la hausse des prix des grains, la concurrence des pays émergents, l'augmentation du dollar canadien et des événements de nature sanitaire. Cet ensemble de facteurs produit une obligation de virage compétitif pour assurer les parts du marché et ce type de virage provoque habituellement ce qui est tristement appelé une rationalisation de la production par la fermeture des plus coûteux et des plus petits. Il s'agit d'équilibrer les sacrifices faits par l'industrie et l'investissement de la société en général pour soutenir une activité économique dès que son autosuffisance à long terme et sa contribution nette sont démontrées.

En 2011, les données de la Financière agricole sur le Programme d'assurance stabilisation des revenus agricoles pour le porc représentent 102,6 millions$ de cotisation de la part des producteurs contre 172,6 millions de compensation pour un coût net de 70 millions absorbé par l'État québécois. Cette somme, néanmoins importante, ne représente que 5% de la valeur de la production, dont 60% est destinée à l'exportation. En contrepartie, les gouvernements reçoivent du secteur de la production porcine 116 millions d'entrées fiscales et de parafiscalité. L'opération est donc rentable pour l'État.

Au consolidé, la filière porcine québécoise dans son ensemble (incluant la transformation qui dépend des approvisionnements des fermes) a contribué directement et indirectement au maintien de 25 600 emplois au Québec en 2011. Ses versements en salaires et traitements ont totalisé 877 millions avant impôt, alors que sa contribution à l'économie de la province a été de l'ordre de 2,24 milliards en termes de valeur ajoutée. Finalement, ses apports aux revenus gouvernementaux et à la parafiscalité ont atteint un total annuel de 339 millions.

Avec ces données, le soutien de l'État paraît être une bonne affaire pour le contribuable et contribue à maintenir vivantes les régions rurales du Québec en créant des emplois. Cela ne signifie par ailleurs pas que des analyses fines ne seraient pas utiles pour assurer l'efficience globale des interventions de l'État, notamment en ce qui concerne le mode de production et de rémunération selon les fermes indépendantes, les coopératives et les producteurs intégrés.

---

M. Dorion, vous mentionnez le coût, pour la production porcine, du programme d'assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) en 2011. Ce coût sera beaucoup plus élevé en 2012: les producteurs de porcs verseront 103 millions en cotisations à l'ASRA, et Québec y mettra 294 millions, selon les prévisions de la Financière agricole. Le coût net absorbé par l'État québécois pour garantir les revenus des éleveurs de porcs sera donc de 191 millions cette année. Merci de nous lire.

Marie Allard