Le processus qui nous mènera au Sommet sur l'enseignement supérieur est enfin lancé. Tous conviennent que cet exercice de réflexion sur l'enjeu crucial de la place des universités dans notre société est nécessaire, mais la discussion souhaitée ne pourra déboucher sur des consensus que si la démarche s'appuie sur des bases rigoureuses.

Or, le document préparatoire pour ce sommet reprend les chiffres d'une publication contestée de 2011 du ministère de l'Éducation sur le financement global de nos universités sans questionner sa méthodologie bancale. Ce qui est le plus préoccupant, c'est l'amalgame incorrect qu'on y retrouve des dépenses associées à la recherche subventionnée et aux infrastructures avec les coûts de fonctionnement.

L'auteur de ce document reconnaît lui-même qu'il «aurait été souhaitable de présenter des données distinctes pour la dépense de fonctionnement (sans les dépenses relatives à la recherche et aux immobilisations)». Mais voilà que ces données agrégées se retrouvent citées, notamment par la Fédération étudiante universitaire du Québec, pour mettre en doute le sous-financement des universités québécoises.

Au Québec, plus que nulle part ailleurs au Canada, le financement de la recherche occupe une part importante du budget universitaire. Les chercheurs québécois, nous en sommes fiers, performent très bien dans l'obtention de fonds pour la recherche subventionnée. Cependant, ces fonds n'appartiennent pas aux universités; les universités en sont les fiduciaires au nom des chercheurs et des équipes qui en ont fait la demande par la présentation de projets. Conformément aux règles des organismes subventionnaires provinciaux et fédéraux qui les octroient, ces fonds doivent être exclusivement consacrés aux projets de recherche ciblés pour lesquels ils ont été obtenus.

Ces fonds ne peuvent pas servir à la construction de nouvelles salles de classe ou à la mise sur pied de bibliothèques de pointe. Le financement de la recherche n'est pas non plus destiné à l'embauche de nouveaux professeurs pour réduire le ratio professeur-étudiants ou au salaire d'adjoints administratifs pour rédiger les rapports de reddition de comptes exigés par les gouvernements. Le financement de la recherche ne couvre pas les coûts d'électricité, de chauffage, d'entretien des bâtiments et des terrains.

Nos institutions font tout pour maintenir les conditions de qualité de formation et de recherche qui sont requises par les organismes d'agrément nationaux et internationaux. Dans une large proportion de nos programmes de formation - par exemple en médecine vétérinaire, en génie, en comptabilité, en sciences de l'éducation et en psychoéducation -, nous devons nous soumettre à ce processus d'accréditation et remplir les exigences de standards de qualité pour que nos étudiants soient reconnus dans leur profession. Les ordres professionnels comptent sur nous pour former la relève selon les critères élevés de ces organismes d'agréments, au bénéfice de la protection du public.

Voilà pourquoi l'analyse de la CREPUQ isole les données relatives aux coûts de fonctionnement. Selon le palmarès annuel du magazine Maclean's, les quatre universités québécoises offrant des programmes de médecine se classent parmi les cinq dernières quant au budget de fonctionnement par étudiant. Et selon une nouvelle étude du Conseil des universités de l'Ontario, l'ensemble des universités québécoises occupe la toute dernière place à cet égard.

Dans sa plateforme électorale, le Parti québécois a annoncé qu'il fallait réinvestir «de façon significative dans l'éducation supérieure», soutenant que «nous devons donc faire en sorte que nos établissements d'études supérieures se comparent aux meilleurs de la planète et que les Québécois puissent y accéder sans égard à leur condition économique». Ces engagements sont prometteurs. Espérons qu'ils prévaudront sur les arguments de ceux qui jouent l'avenir des étudiants et du Québec sur la base d'un portrait trompeur de la réalité financière avec laquelle les universités doivent composer.

Michael Goldbloom

Université Bishop's

Alan Shepard

Université Concordia

Nelson Michaud

École nationale d'administration publique

Christophe Guy

École Polytechnique de Montréal

Yves Beauchamp

École de technologie supérieure

Michel Patry

HECMontréal   

Daniel Coderre

Institut national de la recherche scientifique

Heather Munroe-Blum

Université McGill

Guy Breton

Université de Montréal

Sylvie Beauchamp

Université du Québec

Johanne Jean

Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue

Martin Gauthier

Université du Québec à Chicoutimi

Claude Corbo

Université du Québec à Montréal

Jean Vaillancourt

Université du Québec en Outaouais

Jean-Pierre Ouellet

Université du Québec à Rimouski

Nadia Ghazzali

Université du Québec à Trois-Rivières

Raymond Duchesne

TÉLUQ Université du Québec

Luce Samoisette

Université de Sherbrooke