En tant qu'employé d'Énergie Atomique du Canada, j'ai été choisi dans l'équipe d'élite chargée du déclassement de Gentilly-1. Notre équipe était formée d'employés d'Énergie atomique du Canada au Québec et en Ontario, et d'employés locaux d'Hydro-Québec. Notre tâche consistait à déclasser la centrale nucléaire et profiter de l'expérience acquise pour former une équipe qui pourrait accomplir les mêmes tâches à travers le monde.

Un  déclassement consiste à déclasser les bâtiments de leur statut actuel de centrale nucléaire (avec 280 employés à un salaire annuel de 80 000 $) en un statut d'entrepôt de matériel nucléaire (avec quelques gardiens à un salaire annuel de 30 000 $).

Nous avons entreposé les pièces les plus radioactives telles que le combustible usé dans des silos de ciment que nous avons construits sur le site. Il va sans dire que l'on parle que d'une solution à court terme, ou au mieux à moyen terme, d'où le fondement d'arguments fréquemment utilisés par les environnementalistes. Tous les matériaux faiblement ou moyennent radioactif ont été entreposés dans le bâtiment du réacteur et nous avons fermé la porte.

À la fin des travaux, nous avons obtenu un contrat pour la centrale nucléaire de Douglas Point en Ontario. On pensait que toute l'équipe serait impliquée. Déception, nous avons été deux à être appelés. Après ce contrat, plus rien.

Quand on fait miroiter la possibilité d'utiliser l'expertise acquise lors du déclassement ou du démantèlement de Gentilly-2 pour que l'équipe l'utilise ailleurs, permettez-moi d'en douter. Quand il était question de restaurer la centrale, aucune considération n'a été donnée à ceux qui ont accompli une tâche similaire à Pointe Lepreau, au Nouveau-Brunswick. Tous les intervenants veulent avoir recours à leur propre équipe.

On a mentionné la possibilité de s'impliquer dans la restauration ou le déclassement d'un autre réacteur CANDU en Corée du Sud. Pour avoir séjourné sur place lors de sa construction et la connaissance de leur mentalité que j'y ai acquise, on doit oublier le tout, si ce n'est que pour quelques consultants.

En tenant compte des arguments pour et contre le maintien de la centrale ainsi que des problèmes techniques et financiers reliés à la restauration de la centrale, je dois malheureusement voter pour mettre fin à la filière nucléaire québécoise que nous avons mise sur pied.