Voici ce que j'ai à vous dire aujourd'hui: l'Europe doit prendre un nouveau cap. Elle doit pour cela s'affranchir des idées anciennes.

La réalité d'aujourd'hui, c'est que dans un monde interconnecté, les États membres ne sont plus en mesure de maîtriser seuls le cours des événements. Pourtant, ils n'ont pas doté leur Union - notre Union - des outils nécessaires pour affronter cette réalité nouvelle. Nous vivons actuellement une transition. Nous sommes à un tournant, qui exige des décisions et une volonté politique.

Oui, la mondialisation exige un surcroît d'unité européenne.

Une plus grande unité passe par plus d'intégration.

Et plus d'intégration appelle un supplément de démocratie, de démocratie européenne.

Pour parvenir à une union économique et monétaire véritable et approfondie, à une union politique dotée d'une politique étrangère et de défense cohérente, il est indispensable que l'Union européenne telle que nous la connaissons évolue.

N'ayons pas peur des mots: nous devrons évoluer vers une fédération d'États-nations.Voilà de quoi nous avons besoin, tel est notre horizon politique.

C'est cette ambition qui doit guider nos travaux au cours des années à venir.

Aujourd'hui, j'en appelle donc à une fédération d'États-nations. Pas à un super-État, mais à une fédération démocratique d'États-nations capable de régler nos problèmes communs en partageant la souveraineté d'une manière qui permette à chaque pays et à chaque citoyen d'être mieux équipé pour maîtriser son propre destin. Une Union qui est aux côtés des États membres, et pas une Union qui se dresse contre eux. À l'ère de la mondialisation, la mise en commun des souverainetés n'équivaut pas à une perte, mais à un gain de pouvoir.

J'ai parlé à dessein d'une fédération d'États-nations parce qu'en cette période troublée, angoissante, nous ne pouvons pas abandonner la défense de la nation aux seuls nationalistes et populistes. Je crois en une Europe dont les citoyens sont fiers de leur Nation, mais également fiers d'être Européens et fiers de nos valeurs européennes.

Nombreux sont ceux qui jugeront ce programme trop ambitieux, irréaliste. Mais je vous pose la question: est-il réaliste de poursuivre sur la voie actuelle? Est-il réaliste de voir ce à quoi nous assistons aujourd'hui dans de nombreux pays européens? Est-il réaliste de voir les contribuables payer pour les banques, puis être forcés de céder leur maison à ces mêmes banques parce qu' ils ne peuvent plus payer leur crédit? Est-il réaliste de voir que plus de 50% des jeunes sont au chômage dans certains de nos États membres? Est-il réaliste de continuer à vouloir éteindre les incendies et de simplement accumuler les erreurs et les solutions peu convaincantes? Est-il réaliste de penser que nous pouvons gagner la confiance des marchés lorsque nous avons si peu

confiance les uns dans les autres?

Pour moi, c'est cette réalité qui n'est pas réaliste et qui ne peut plus durer.

La voie réaliste est celle qui va nous rendre plus forts et plus unis. Le réalisme consiste à hisser notre ambition au niveau de nos défis.

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Ce texte est extrait du discours sur l'état de l'Union 2012 que M. Barroso a prononcé cette semaine devant le Parlement européen.