Depuis quelques années, la Chine tente de diversifier ses chaînes mondiales d'approvisionnements afin d'assurer son importante demande intérieure en ressources naturelles. Malgré le ralentissement économique qui la touche, la Chine maintient malgré tout un rythme de croissance considérable et continue d'importer une grande quantité de matières premières sous la forme de pétrole, de charbon, de cuivre, et d'oxyde d'aluminium.

Dirigé jusqu'à tout récemment vers des pays en développement d'Asie et d'Afrique, l'investissement direct chinois se redirige désormais vers les pays de l'OCDE et le Canada, riche en ressources naturelles, se retrouve particulièrement dans la mire de la Chine. L'arrivée de ces investissements chinois comporte toutefois son lot d'incertitudes et a provoqué tout un débat.

Par exemple, l'offre d'achat récemment déposée par l'entreprise étatique China National Offshore Oil (CNOOC) pour acquérir Nexen, une compagnie d'hydrocarbures de Calgary, a créé bien des remous. Certains analystes affirment que cet investissement est inquiétant en raison du mode de gouvernance et de la propriété des entreprises chinoises. On redoute, par exemple, que ces entreprises ne respectent pas les lois du marché, de sorte que le gouvernement chinois pourrait se servir de ces investissements afin de s'approprier des ressources canadiennes. D'autres commentateurs avancent en contrepartie que suffisamment de lois sont déjà en place au Canada afin d'éviter ce genre de résultat et que ces règlements constituent le meilleur moyen pour gérer l'investissement direct étranger.

Quoi qu'il en soit, l'arrivée de capitaux chinois suscite des inquiétudes. Au Québec, il suffit de se rappeler l'émoi soulevé en 2010 par un reportage de l'émission Une heure sur terre, qui révélait l'intérêt d'entreprises chinoises pour l'achat de terres agricoles de la Montérégie, pour réaliser la crainte que soulève l'investissement chinois.

Il n'y a pas que l'appétit chinois qui pousse Beijing à regarder vers d'autres horizons; depuis quelques années le gouvernement fédéral s'est également fait promoteur en Asie du secteur des ressources afin d'y attirer de nouveaux capitaux. Le gouvernement québécois, pour sa part, n'est pas en reste, misant substantiellement sur l'investissement chinois afin de financer son projet du Plan Nord. La situation économique étant plus difficile chez les investisseurs traditionnels d'Europe et des États-Unis, la proportion des investissements en provenance de l'Asie et particulièrement de la Chine est appelée à croître considérablement. Un récent rapport du Conference Board of Canada laisse entendre que la Chine pourrait même devenir la seconde source d'investissement au Canada d'ici 2020.

Or, si l'investissement direct chinois constitue un outil essentiel du développement économique au Canada et au Québec, les réactions du public canadien quant à sa venue ne demeurent pas moins partagées.

Par exemple, un récent sondage de la Fondation Asie Pacific du Canada révèle que 75% des Canadiens s'opposeraient à l'acquisition, par une entreprise d'État chinoise, d'une compagnie canadienne de premier plan. À titre comparatif, ce résultat n'atteint que 56% s'il s'agissait d'une entreprise japonaise et de 55% pour une entreprise américaine.

Si la décision d'accepter ou non une offre d'achat dépend ultimement du gouvernement fédéral via la loi canadienne sur les investissements, les gouvernements provinciaux impliqués sont toutefois forcément sondés par Ottawa lors d'un projet d'acquisition. En raison de ses réserves de pétrole, l'Alberta est certes appelée à devenir une cible principale de l'investissement chinois, mais le Québec, notamment en raison de son Plan Nord, doit également de se préparer à la venue de ces capitaux chinois et comprendre les enjeux qui y sont liés.