J'ai rompu 16 années sans télé en regardant la soirée électorale de Radio-Canada, chez mon frère Daniel. Je me doutais que ce serait un moment historique et je voulais le vivre en même temps que tout le monde, au lieu d'apprendre la nouvelle le lendemain matin, comme à l'accoutumée, en ramassant le journal à ma porte. Eh bien, j'ai été servie par un doublé!

Certains diront que Pauline Marois était prédestinée à devenir première ministre, ses initiales étant prémonitoires, un peu comme Pierre Marc Johnson qui l'a éclipsée naguère à la course à la direction. Mais c'est sa persévérance magistrale qui a contribué à la réalisation de son grand rêve, 27 ans après son premier essai pour devenir chef du PQ. Indépendamment de nos allégeances politiques, le 4 septembre restera un grand jour parce qu'une femme a enfin brisé le fameux plafond de verre en accédant à la plus haute fonction. Les jeunes Québécoises peuvent enfin croire vraiment qu'elles sont égales aux hommes: elles en ont la preuve vivante!

Sauf que la joie de vivre ce moment historique a été trop vite assombrie par l'interruption brutale de son premier discours de victoire. Nonobstant le fait que certains lient ce drame à la dimension linguistique, d'autres à un acte isolé de folie, il n'en demeure pas moins qu'une femme venant tout juste d'accéder à la gouvernance a été en quelque sorte muselée.

Et peu importe les intentions de Richard Henry Bain, un décodage possible, c'est qu'il est dangereux pour une femme d'accéder au statut de premier ministre, tout comme il est dangereux de vouloir un pays, ce qui risque d'engendrer la peur. Richard Lachapelle, un de mes amis Facebook, a écrit qu'il y a eu «un mort et 8 millions de blessés». Malheureusement, on doit soustraire de ce nombre tous ceux qui osent se réjouir et affichent publiquement sur Facebook leur souhait de poursuivre l'action criminelle inachevée. Il importe de dénoncer ces discours haineux et de résister à la peur, ce poison qui tue l'espoir et l'enthousiasme.

Souhaitons que les discours des chefs de l'opposition, quand ils ont parlé de l'importance du respect et de la collaboration pour être au service de la population, ne soient pas des voeux pieux. Avec le PQ minoritaire qui devra tendre la main aux libéraux, à la CAQ et aux deux députés de Québec solidaire, l'heure est à la solidarité!