J'ai effectué ma spécialité en médecine d'urgence à McGill et je pratique et enseigne toujours à Montréal, au centre universitaire de McGill (CUSM). Il y a en effet un problème quant à la proportion importante de nos gradués qui quittent le Québec. Mais je ne suis pas certain que François Legault saisisse bien les raisons qui poussent ces jeunes médecins à s'exiler, surtout si il parle de mesures punitives ou coercitives!

Bon an mal an à McGill, nos programmes combinés en médecine d'urgence pour les spécialistes et pour les gradués de médecine familiale produisent au moins une quinzaine de médecins, tous aptes et hyper motivés à travailler dans nos urgences.  S'il est vrai que quelques-uns originaires d'autres provinces ou d'autres pays veulent repartir, la grande majorité, dont plusieurs non québécois, ne demande qu'à pouvoir s'installer ici dans la grande région de Montréal que plusieurs d'entre eux ont appris à aimer.

Malheureusement, les règles du ministère de la Santé rendent extrêmement difficile, sinon impossible, l'obtention d'un poste ici.  Un exemple: l'an dernier seulement, le CUSM n'a obtenu aucun poste pour les nouveaux gradués de nos programmes.  Dans les quatre dernières années seulement, quatre de nos nouveaux médecins spécialistes en urgence, parfaitement bilingues, ont été accueillis à bras ouverts par Toronto et Ottawa, parce qu'ils ne pouvaient pas se trouver d'emploi ici à Montréal...

L'éditorialiste Ariane Krol touche aussi un point important au sujet des omnipraticiens qui ne font pas de suivi de patients. Les chiffres d'une fédération ne disent pas tout de la réalité.  Ce sont des omnipraticiens qui assurent l'immense majorité des gardes dans nos urgences québécoises - autour de 800 font du temps plein ou presque à l'urgence uniquement.  Ces médecins ne sont pas des médecins de famille- ils n'en ont ni les aptitudes ni les attributs.  Il est extrêmement exigeant de pratiquer la vraie médecine familiale.  Cette pratique demande des attitudes et des compétences, sans parler du don de soi, qui ne sont pas valorisées dans notre système de santé ni dans notre société.

Trouver suffisamment de médecins de famille ne se fait pas par une simple opération comptable.  C'est toute l'organisation en profondeur de notre système de première ligne qui doit être revue.