Conformément à la loi 78, la police devrait-elle empêcher les manifestants de bloquer l'entrée des cégeps et des universités afin que les élèves et étudiants qui le souhaitent puissent assister à leurs cours?

La loi, c'est la loi



La police devrait intervenir et de manière exemplaire. La loi est faite pour être respectée, qu'elle nous plaise ou non. Quand un panneau nous dit: 100 km/h et qu'on ne respecte pas la limite de vitesse, on se fait coller. Cela ne nous enchante pas, mais c'est la loi. Pourquoi avons-nous déjà laissé autant de latitude aux étudiants radicaux? Si la police n'est pas capable de faire son job, qu'elle demande l'aide à d'autres groupes d'intervention.



Éric Lessard




Pas du tout



Non, pas du tout. Les policiers auraient dû se ranger du côté des étudiants et se faire amicaux avec eux depuis le tout début, au lieu de montrer leur côté plus violent, voire baveux. Ça aurait évité beaucoup de casse des deux bords.



Jean-Philippe Côté




Protéger le droit d'étudier



Je m'apprête, ainsi que des dizaines de milliers d'autres étudiants piégés par le mouvement de grève, à me livrer à l'exercice de gymnastique intellectuelle et de discipline personnelle que représentera la nécessité d'achever le trimestre d'hiver en catastrophe avant de franchir, à quelques jours d'intervalle, le seuil de l'université et de tourner la page de cet épisode qui nous marquera pour longtemps. Nous ne pouvions songer à plus violente transition, bien qu'elle constitue l'ultime recours avant une annulation pure et simple du trimestre d'hiver. Notre unique préoccupation est d'en terminer au plus vite avec le cégep et de passer à autre chose. Il incombe au gouvernement la responsabilité de protéger le droit d'étudier des étudiants et je suis content de voir que, au vu des récentes déclarations de ministres libéraux, nous n'avons pas été oubliés. Il importe à présent de voir si ces paroles se traduiront en actes au cours de la semaine du 13 août. Il s'agira du moment où jamais pour le premier ministre de prouver qu'il peut agir en véritable homme d'État.



David Borel, étudiant au collège de Bois-de-Boulogne




Si c'est pacifique, non



Je ne crois pas que la police devrait intervenir auprès des manifestants qui bloquent les entrées quand c'est fait pacifiquement. C'est toujours lorsque la police s'en mêle que ça dégénère et qu'il y a des blessés.



Dominique Tardif



Mollesse du gouvernement



La Loi 78 (12) a été adoptée. Elle doit donc être appliquée, d'autant plus que c'est une loi d'urgence et d'exception. Le gouvernement a d'ailleurs fait une grave erreur en ne la faisant pas appliquer dès le moment de son adoption. En agissant ainsi, il envoyait un message de mollesse. Les étudiants l'ont bien et vite compris! Et le gouvernement continue de suivre cette ligne. L'agitation devrait donc recommencer. Je ne puis que conclure que le gouvernement libéral a mal géré le conflit étudiant, lequel a dégénéré en crise sociale. À cet égard, il ne mérite donc pas la note de passage.



Michel Lebel, Entrelacs



Après les élections



La loi 12 (anciennement 78) est contestée devant les tribunaux et le parlement est dissout, ce qui a plongé le Québec en campagne électorale. Théoriquement, il n'y a donc plus de gouvernement pour négocier avec la communauté étudiante dans le but de mettre fin à la crise. À mon sens, la police a déjà été largement employée avec les dérives que l'on a connues (Victoriaville, arrestations de masse le 23 mai, etc.) et n'a fait qu'envenimer le conflit. La rentrée s'annonce chaotique, notamment à cause de cet usage annoncé des services policiers. Je crois donc que la police tout comme le refus gouvernemental de négocier alimenteront la crise plutôt que de la contenir et encore moins de la résoudre et, conséquemment, je ne crois pas que la police devrait mener des interventions visant à empêcher les blocages tant qu'un nouveau gouvernement ne sera pas élu.



Marc-Olivier Carle



Aux étudiants de foncer



Au minimum, les policiers doivent intervenir pour prévenir les dommages par les casseurs, mais ce sont les étudiants qui veulent aller en classe qui devraient se prendre en main, au lieu de toujours attendre après les policiers et le gouvernement, comme c'est la coutume au Québec. Les étudiants qui veulent retourner sont beaucoup plus nombreux et devraient foncer. Quelle bande de poules mouillées. Les policiers font ce que l'on leur demande et c'est d'intervenir le moins possible. Ils n'appliquent pas la loi comme nous verrions dans d'autres provinces, car la loi et l'ordre ne sont pas la force au Québec. Les profs qui appuient le blocage et qui de plus se joignent aux protestations devraient tous être renvoyés ou si non voir leur salaire coupé pour les heures non travaillés pendant qu'ils font la grève, car pour eux, il s'agit effectivement d'une grève. C'est l'anarchie par une bande de moins de 1 000 grandes gueules à Montréal surtout, qui peuvent se payer le luxe de rester sur les bancs d'école jusqu'à 30 ans, pour qui les études sont un loisir et tout le monde rampe devant leur supposé représentativité. La supposés presse objective devrait analyser et dénoncer la mascarade des votes étudiants.  Quel beau modèle de démocratie et de société. Ces conflits vont faire le bonheur des écoles privées, cégeps et universités anglophones qui  vont être en forte demande.



Hélène Lamontagne



Limites aux droits



Premièrement, on devrait se poser la question en amont de celle  qui est posée : les étudiants ont-ils le droit d'empêcher des citoyens d'être prestataire d'un service pour lequel ils ont payé? Le droit des uns finit là ou celui des autres commence.



Bernard Théroux



Préparatifs nécessaires



Bien évidemment, il faut prévoir une présence policière et anticiper devoir procéder à quelques arrestations de masse, devant les portes des établissements aux prises avec des éléments plus turbulents.  C'est une nécessité, pour protéger les étudiants sérieux dont l'avenir serait définitivement compromis par l'annulation d'une session. Mais il faut aussi s'attendre à ce que les moins scrupuleux parmi les étudiants cherchent à perturber le déroulement des cours en tant que tel, en s'immisçant dans les salles de classe (comme ce fut le cas à l'Université de Montréal, de la part des étudiants qui n'ont pas respecté l'injonction de la Cour supérieure).  Pour être bien prêt, je pense qu'il faut simplement filmer les cours dans les départements et établissements touchés par le boycott.  Une ou deux caméras par salle de classe, et déposer des accusations pénales contre les fautifs en vertu de la Loi 12, appuyées par la preuve visuelle.  L'effet dissuasif pourrait aussi suffire à éloigner certains esprits vils.  (Si un investissement est nécessaire, notez que ces caméras pourraient être réutilisées par la suite pour fins de sécurité, afin de les rentabiliser).  Les établissements devraient aussi songer à renvoyer les récalcitrants, en vertu de leur propre réglementation.  Enfin, il faut prévoir des gardes de sécurité à l'intérieur, devant les salles de classe lors des premiers jours, pour empêcher des rassemblements ponctuels bloquant l'accès aux salles.



Antonin Lafrance-Prudhomme



Exemple pitoyable



Il me semble que c'est bien évident que la police devrait à tout prix empêcher les manifestants de bloquer l'entrée des institutions!  A moins que les Québécois soient prêts à vivre désormais dans une société où l'intimidation et le non-respect des lois sont monnaie courante...  Ce n'est certainement pas mon cas!  Par ailleurs, je souhaite que les enseignants qui appuient ouvertement la cause étudiante en ne se présentant pas en classe soient non seulement privés de salaire, mais également congédiés.  Ce sont tous des irresponsables qui offrent un exemple pitoyable de désobéissance civile aux jeunes Québécois.  Sans compter qu'en refusant de donner leurs cours, ces employés de l'État crachent impunément au visage de la vaste majorité des étudiants qui, elle, veut étudier!  Nous vivons présentement une situation sans précédent, inacceptable au sein de toute société démocratique qui se respecte.



Martine Savard, Montréal



Un chef méprisant



Non, la police ne devrait pas empêcher les manifestants de bloquer les entrées des institutions. Parce que la loi 78 est un coup de masse asséné de manière à briser, brimer les étudiants et leurs associations dans leurs droits et libertés. Parce que le conflit étudiant a été ignoré, méprisé,

pris à partie par notre premier ministre, ce qui constitue selon moi un mépris englobant toute la population du Québec. Parce qu'en aucun temps, le premier ministre n'a manifesté une ouverture d'esprit, une compréhension «humaine» de ce conflit, reléguant celui-ci encore plus loin qu'au dernier rang dans ses priorités de chef... Une ministre est partie, une autre quitte aussi... toujours dans ce conflit. Pourtant, un chef qui ignore les jeunes, un chef qui ignore cet avenir qu'ils représentent, un chef qui fait passer une loi plutôt que de régler un conflit, ce chef ne mérite pas que cette loi soit respectée.



Gisèle Delisle, Longueuil



Un échec



Depuis l'adoption de la loi 78, nous n'avons pu que constater les conséquences négatives des interventions policières à l'entrée des établissements touchés par la grève étudiante. Affrontements, blessures, insécurité tant chez les enseignants que les étudiants, la présence de policiers a surtout servi à attiser la colère, ce qui était inutile. Les injonctions demandées par certains étudiants afin qu'ils puissent poursuivre leurs cours n'ont que mis dans l'embarras d'une part les policiers, devant appliquer une loi très controversée, et d'autre part les enseignants et les directions des établissements. Oui, l'accès à l'éducation est un droit, mais quand on est rendu au point où les dépenses engendrées pour gérer ce conflit dépassent les millions de dollars, il est évident que les dispositions de la loi 78 sont un échec. Cela dépasse l'entendement. Il serait pourtant plus simple de faire ce que tout premier ministre digne de ce nom aurait fait depuis longtemps : trouver une vraie solution pour régler de bonne foi le coeur du problème (soit la hausse des droits de scolarité). Malheureusement, le gouvernement Charest a démontré qu'il en était incapable. Il a préféré cacher la poussière sous le tapis.



Anouk Charles, Laval



Le choix des étudiants



Faire appel aux forces de l'ordre envenimerait les choses. Les étudiants et les étudiantes en grève se sont doté d'espace démocratique pour prendre leur propre décision, une intervention policière ne ferait que faire un pied de nez aux décisions des étudiants et étudiantes. Si les étudiants désirent rester en grève c'est leur choix, il leur appartient, et aucun constable ou autre agent de la paix ne pourra leur faire changer d'idée. Pour avoir déjà vécu un retour en classe forcé en avril dernier je peux aisément dire que la répression politique et la dérive sécuritaire ne favorisera en rien le retour aux études: ce serait plutôt le contraire. Jamais durant notre grève nous n'avons atteint un tel niveau de confrontation que lorsque l'on nous à forcer à rentrer en classe. En fait, beaucoup de cours ne se sont pas donné compte tenu du climat régnant dans les salles de cours et les cours qui ont été donné était plutôt minimalistes et relevait plutôt de la blague que de l'apprentissage. À quoi bon forcer un retour en classe si celui-ci ne se fait pas dans un cadre pédagogique acceptable? Il ne faut pas semblant d'être aveugle, comment voulez-vous étudier pris entre les poings serré des agents de sécurité et les matraques des policiers anti-émeute? Le seul retour en classe possible se fera lorsque les étudiants en grève le décideront.



Émile Duchesne, militant étudiant au collège d'Alma



Manque flagrant de jugement



En cas de conflit étudiant, la police devrait-elle intervenir? Oui, si cela devait se faire de façon professionnelle, dans le respect non pas de la seule loi 78 mais de toutes les lois, de la charte canadienne des droits et libertés, et dans le respect des individus. On sait déjà que cela n'arrivera pas. On demande aux policiers de faire preuve de jugement. C'est de l'aveuglement volontaire. Les policiers ont depuis longtemps fait la preuve par A + B que le jugement venait trop souvent en option. C'est encore plus évident depuis le début du conflit étudiant. Les corps policiers au Québec, en particulier le SPVM et la SQ, puisque ce sont ces deux corps policiers que l'on a vus en « action » lors de la grève des étudiants ont de sérieux problèmes de sélection à l'embauche et à la formation. Il ne faut pas se leurrer sur la formation et la compétence de nos policiers.  Toutes deux sont déficientes. Le candidat policier suit trois années de formation en techniques policières au CEGEP, suivi de quelques mois de formation à l'Institut de Nicolet. Bref, on forme essentiellement des « techniciens ». C'est bien peu, trop peu, compte tenu de leurs responsabilités, de leurs obligations, de leurs droits, de leur pouvoir, de la protection dont ils jouissent, et j'oserais ajouter du salaire qu'ils reçoivent. On remet à un policier une arme à feu, potentiellement léthale, on lui donne un travail à faire et il est protégé « dans l'exercice de ses fonctions » par des lois, par le premier-ministre, le ministre de la sécurité publique, les politiciens, tous partis confondus, le maire de la ville, son syndicat, la « Fraternité », ses supérieurs, le Chef, ses collègues, l'omerta, etc. S'installe une culture d'impunité. Les dérapages ne seront pas sanctionnés. Cela donne le SPVM, un corps policier qui a perdu le respect d'une bonne partie de la population. Un corps policiers répressif, affublé au cours des derniers mois du sobriquet assez révélateur de « SS-PVM ». On a vu des brutes en armures avec boucliers, des bandits déguisés en policiers, jouer de la matraque, frapper des jeunes qui n'avaient que leurs dos nus à leur opposer.  Certains policiers, et certaines, se sont transformés en Sgt Pepper, aspergeant à qui mieux mieux les étudiants, parfois uniquement par vengeance mesquine, sans que la situation le commande. Pour faire bonne mesure, certains policiers ont même utilisé de façon négligente des armes pouvant blesser, estropiant à vie quelques manifestants au passage. Les arrestations se sont multipliées : 100, 200, voire 500 arrestations! On a humilié des citoyens de tous âges. Pourtant, pourquoi avais-je l'impression que trop souvent les policiers laissaient parler leurs préjugés personnels? Grâce à la protection que confère l'impunité. En cas de dérapage, et ils ont été nombreux, le maire et le ministre de la sécurité civile sont même allé jusqu'à féliciter les policiers pour leur « excellent » travail! Où était le leadership des officiers supérieurs et du Chef du SPVM? Comment se fait-il que nos policiers aient été incapables d'identifier et d'arrêter 25 casseurs mais aient répondu présents pour prendre en souricières 500 manifestants pacifiques, badauds, touristes, et autres personnes se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment? C'était non seulement non professionnel, c'était lâche et profondément révélateur de la culture au SPVM!



Jean-Charles Côté