Le 27 juillet s'ouvrent à Londres les Jeux olympiques. La capitale britannique va être au centre du monde jusqu'à la cérémonie de clôture prévue le 11 août. Avec la Coupe du monde de football, les Jeux olympiques sont l'événement le plus médiatisé au monde. La télévision crée un stade universel où des centaines de millions de personnes peuvent trouver leur place.

De ce fait, le sport devient plus que du sport. Les enjeux deviennent plus importants que le simple résultat de la compétition et par la puissance de l'image, par la force du symbole, ils prennent un caractère stratégique.

Le Comité international olympique (CIO) répète à l'envi qu'il ne faut pas mélanger sport et politique. Cela fait même partie de la Charte olympique. C'est une contradiction, voire une hypocrisie. Les Jeux ont pris une telle importance qu'il est impossible de les réduire à leur seule dimension sportive.

Cela était vrai dès la renaissance des Jeux. Lorsque le Baron de Coubertin veut recréer les Jeux olympiques des temps modernes, il a bel et bien un objectif puissamment politique: contribuer à la pacification des relations internationales en permettant au sport de rapprocher peuples et nations. Y a-t-il un objectif plus stratégique que celui-ci?

Il en avait un autre non avoué, mais tout aussi politique: contribuer à la formation physique de la jeunesse française, la défaite de 1870 étant largement attribuée à la supériorité athlétique des soldats allemands grâce à une pratique intense du sport. L'une des disciplines olympiques qui vont faire leur entrée dans les jeux modernes est le pentathlon, qui combine des épreuves de course, de tir, d'escrime, de natation et d'équitation, toutes utiles d'un point de vue militaire.

Bien sûr, les premiers Jeux seront assez peu universels: 400 athlètes environ, 13 nations seulement y participent. À l'époque, les distances sont longues, les médias s'y intéressent peu. Le sport est encore le fait d'une petite élite. Mais du choix du pays hôte à celui des nations qui peuvent concourir, les décisions du CIO ont toujours été marquées du sceau de la politique. L'Allemagne vaincue est exclue des Jeux après la Première Guerre mondiale et c'est pour permettre sa réintégration dans la communauté internationale qu'on lui accorde en 1931 les Jeux de Berlin de 1936. Hélas, entre-temps, Hitler va parvenir au pouvoir et utiliser l'événement comme un instrument de propagande pour le régime nazi.

L'URSS, qui a longtemps dénoncé les «jeux bourgeois», va y participer à partir de 1952. Il est vrai qu'ils avaient lieu à Helsinki, en Finlande, pays voisin et lié diplomatiquement à Moscou. Pendant la guerre froide, au-delà de la bataille idéologique entre l'Union soviétique et les États-Unis et du calcul des arsenaux conventionnels et nucléaires de chacune des deux superpuissances, celles-ci s'affrontaient également dans l'arène sportive. Le décompte des médailles devait prouver quel était le système qui était supérieur. Il y avait dans ce bras de fer une sous-compétition entre l'Allemagne de l'Ouest et de l'Est, qui devait amener la seconde à doper massivement ses athlètes.

En 1964, l'attribution des Jeux à Tokyo marque la réintégration de l'empire nippon dans la famille occidentale. La décolonisation va accroître le nombre de nations africaines participantes qui vont très rapidement demander l'exclusion des Jeux de l'Afrique du Sud. Le boycottage du pays de l'apartheid va commencer dans les enceintes sportives. Ce n'est qu'après le démantèlement de l'apartheid que l'Afrique du Sud sera réintégrée dans la famille olympique pour les Jeux de Barcelone en 1992. En attribuant les Jeux à Pékin pour 2008 puis à Rio pour 2016, le CIO prend acte et appuie la multipolarisation du monde.

Bref, le CIO, qui ne veut pas mélanger sport et politique, est un acteur stratégique global.