À la suite des fusillades des derniers mois à Toronto, dont celle de lundi qui a fait deux morts et 23 blessés, la ville est en état de choc.

Plusieurs Torontois affirment que ce n'est pas la ville qu'ils connaissent. Certes, Toronto demeure l'une des villes les plus sécuritaires en Amérique du Nord, surtout si on la compare à d'autres métropoles américaines comme Chicago. D'autres villes canadiennes, telles que Vancouver et Edmonton, connaissent aussi ce type de violence. Peu importe, Toronto donne l'impression d'être moins sécuritaire qu'avant. Que faire pour arrêter une telle violence?

Les crimes des derniers mois sont le résultat de conflits impliquant des gangs de rue. Les politiciens, policiers et universitaires connaissent mal ce milieu. Les membres des gangs de rue ont leur propre code d'honneur et ils agissent selon leurs propres règles. Ils sont souvent issus de minorités ethniques, ce qui soulève des enjeux relatifs à la marginalisation de certaines communautés possiblement moins bien intégrées. Certains gangs de rue sont affiliés à des groupes à l'extérieur du pays.

Ces milieux sont difficiles à percer et les policiers trouvent difficile d'y faire enquête. Pour les membres des gangs de rue, des jeunes adultes déjà endurcis, la violence fait partie du quotidien. Ils achètent facilement des armes à feu sur le marché noir. Ce qui nous choque comme citoyen est à leurs yeux normal. Comment en sont-ils venus à accepter cette violence? Au fil des ans, les forces de l'ordre ont étudié les rouages de la mafia et des groupes de motards. Cependant, nous en savons peu sur les gangs de rue.

Toronto a déjà connu une saison estivale semblable en 2005, qualifiée par les journalistes de «l'été du fusil». La Ville a réagi en identifiant 13 quartiers prioritaires - des enclaves de pauvreté dispersées dans cette grande ville prospère. Toronto y a financé plusieurs projets. Dans un climat d'austérité budgétaire, ce financement a récemment été remis en question.

De telles interventions, associées à celles d'organisations communautaires, sont nécessaires. À elles seules, toutefois, elles ne sont pas suffisantes. Le maire Rob Ford a déclaré une guerre contre les gangs. L'approche répressive a peut-être sa place, mais ce n'est pas la meilleure solution.

Les instances municipales et les policiers doivent élaborer une stratégie pour rejoindre les membres des gangs de rue. Nous ne serons jamais en mesure de comprendre si nous n'amorçons pas avec eux un dialogue. Il faut établir des liens de confiance entre «eux» et «nous». L'adolescent qui rejoint le gang de rue fait un choix rationnel parmi les options qui s'offrent à lui. Les gangs de rue sont des organisations criminelles établies qui offrent des bénéfices à leurs membres: de l'argent, une impression de pouvoir et un sentiment d'appartenance. Nous avons besoin d'une stratégie pour favoriser l'autonomie de ces jeunes adultes afin qu'ils participent à la sécurisation de leurs quartiers et de la Ville. Ce dialogue, quoique difficile, est nécessaire pour sécuriser Toronto.